Le 20 octobre, à l’occasion du sommet des chefs religieux musulmans des pays membres de l’Organisation des États turcs qui s’est tenue à Chouchi, Allahchukur Pachazadeh, le « chef spirituel » des Musulmans du Caucase et d’Azerbaïdjan, s’est violement attaqué à l’Église arménienne.
Il est à noter qu’Allahchukur Pachazadeh est, avec le Catholicos Illia II de Géorgie, le dernier responsable religieux de la région nommé durant la période soviétique, avec, en quelque sorte, la « bénédiction » des autorités de l’époque.
Ci-dessous, un florilège de sa pensée. Bonne lecture à tous …
« L’Azan [l’appel à la prière] retentit dans nos mosquées et nous menons des travaux de construction sur nos terres. Le monde entier a été témoin du vandalisme arménien, des crimes de guerre, du génocide commis à Khojaly, de la destruction délibérée de nos villes et villages, de l’incendie criminel de nos terres, de l’empoisonnement de nos réservoirs, de la destruction des cimetières, des mosquées et des sanctuaires. Les mines posées par l’Arménie continuent de tuer des centaines de civils ».
« L’Église apostolique arménienne encourage la vengeance et mène une campagne internationale de diffamation contre l’Azerbaïdjan. Les déclarations revanchardes de la direction de l’Église arménienne, qui pendant de nombreuses années ont justifié les actions criminelles des dirigeants politiques arméniens de Khankandi [Stepanakert], sont regrettables »
« Avec dans une main une Bible et un fusil dans l’autre, ils ont béni la mort, l’occupation, l’oppression et la violence, méprisant les valeurs religieuses et apportant de nouvelles tragédies au peuple arménien au lieu du bonheur promis ».
« L’Église arménienne doit faire preuve de sagesse, prêcher des idées qui sauveront son peuple, lui apporteront prospérité et progrès. Depuis la ville libérée de Choucha, j’appelle l’Église arménienne d’Etchmiadzine à mettre fin à la haine, au sabotage et au revanchisme ».
« Remplissant votre devoir spirituel envers le Tout-Puissant, vous devriez appeler à la vie au lieu de la mort, de nouveaux désastres et tragédies ! Dire la vérité au lieu de fausses promesses sera votre plus grand service historique au peuple arménien ».
Fin des citations …
Après la lecture de cette série de « pieux mensonges » dont personne n’est dupe, il reste à souligner que les participants à ce sommet ont rendu hommage aux « Martyrs » azéris des guerres du Karabakh dans la mosquée Yukhari Govhar Agha de la vielle. Or, il s’avère que cette mosquée a été restaurée durant les « années de l’occupation arménienne » par la fondation « Initiative pour le développement de l’Arménie » (IDEA) avec le soutien de des dons privés, des contributions notables de la « Fondation du patrimoine historique oriental » de l’homme d’affaires russo-arménien Ruben Vardanyan et de l’homme d’affaires kazakh Kairat Boranbayev.
À l’exception des églises arméniennes restaurées par la « Fondation Aliev » dans la région de Nij pour être ensuite présentées comme des « églises albaniennes », qui pourrait nous donner un seul exemple d’une attention comparable de la part des autorités azerbaidjanaises à l’égard du patrimoine arménien ?
Il, suffit de se souvenir de sort de l’immense nécropole de Djugha détruite à coup de bulldozers par l’armée azerbaidjanaise, du sort des centaines d’édifices de la province du Nakhitchevan, de ceux du « Karabakh de la plaine » [Gartman], de la destruction du grand cimetière arménien de Bakou et de quatre des cinq églises arméniennes de la ville. Seule la cathédrale Saint Grégoire l’illuminateur, après avoir été incendiée lors de la nuit de cristal du pogrom de Bakou le 25 décembre 1989, est aujourd’hui encore debout. Mais elle a été fermée, désacralisée et transformée en bibliothèque.
En 2006, Abulfas Garayev, le ministre azerbaïdjanais de la Culture et du tourisme de l’époque avait déclaré que « la conversion de l’église en bibliothèque s’était imposée parce qu’il n’y avait pas beaucoup de chrétiens arméniens en Azerbaïdjan ».
Quelqu’un à Bakou pourrait-il nous rappeler pourquoi ?
Sahak Sukiasyan ■
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Appel du Saint Siège d’Etchmiadzine au Cheikh-ul-Islam Allahchukur Pachazadeh, Chef spirituel des Musulmans du Caucase
Le 20 octobre, à l’occasion du troisième sommet des chefs religieux de l’Organisation des États turcs à Bakou qui s’est poursuivi dans la ville sous occupation de Chouchi, le Cheikh-ul-Islam Allahchukur Pachazade, Président de la Direction des Musulmans du Caucase, a une nouvelle fois fait des déclarations erronées et trompeuses et assené des jugements sur le conflit du Karabakh, la purification ethnique, la destruction du patrimoine culturel et spirituel turco-islamique, l’usurpation des lieux saints, le prétendu « pacifisme azerbaïdjanais » et le « revanchisme arménien » au sujet desquels les structures étatiques et religieuses de la partie arménienne ont déjà répondu à maintes reprises.
Le chef spirituel de l’Azerbaïdjan n’a pas hésité à adresser des accusations à l’Église arménienne et à travers de fausses affirmations, il a lancé un appel à Saint Etchmiadzine et lui a adressé des directives pour guider notre peuple vers des étapes qui lui apporteraient « non pas de nouvelles catastrophes, mais le salut ».
Il est très étrange qu’après la guerre déclenchée par l’Azerbaïdjan contre le peuple d’Artsakh en 2020 et les atrocités inhumaines commises lors de cette agression le discours provocateur du Cheikh-ul-Islam Allahchukyur Pachazadeh n’ait pas varié d’un iota.
En contradiction avec l’esprit des messages adoptés lors des réunions tripartites des chefs spirituels [Arménie – Russie- Azerbaïdjan], le Président de la Direction des Musulmans du Caucase prétend mettre l’accent sur la coexistence pacifique entre les peuples, mais reste dans le même temps silencieux sur les agressions permanentes de l’Azerbaïdjan, les appels à la guerre et l’arménophobie, les empiètements du territoire souverain de l’Arménie, les provocations quotidiennes aux frontières, les bombardements de pacifiques localités, la détention illégale de prisonniers de guerre arméniens, les tortures, la privation brutale de la vie, les mutilations et les profanations des corps des victimes. Il se tait sur tout ce qui concerne les faits de violation du droit à une vie libre et indépendante de notre peuple d’Artsakh, de la destruction et de l’appropriation du patrimoine historique, culturel et spirituel arménien, qui ont été clairement et minutieusement documentés par la communauté internationales et ses structures.
Les questions évoquées nécessitent des solutions rapides et les problèmes humanitaires obligent plus encore à l’attention et aux efforts de médiation du chef spirituel de l’Azerbaïdjan.
Saint-Etchmiadzine adresse un appel au Cheikh-ul-Islam Allahchuquyur Pachazadeh, Président de la Direction des Musulmans du Caucase, pour que fidèle à sa vocation et à sa mission spirituelle, il prenne des mesures concrètes dans ce sens, pour mettre fin à la douleur et au chagrin des âmes endeuillées.
Que le Seigneur Tout-Puissant bénisse la vie des peuples de la région de sa paix, de sa miséricorde et les grâces abondantes du ciel.
Saint Etchmiadzine, le 21 Octobre 2022
Traduction : Sahak Sukiasyan ■