L’opposition parlementaire est finalement revenue au Parlement. Néanmoins, endommagée. Le parti «Arménie renaissante», dirigé par Vahé Hagopian, a quitté le bloc parlementaire «Arménie» ; trois de ses membres démissionnant de leurs fonctions parlementaires et un restant parlementaire, mais quittant le parti. Les partisans de Robert Kocharian et de l’ARF sont restés seuls membres de l’alliance parlementaire «Arménie». Après plusieurs mois de manifestations dans la rue, ces derniers n’ont pas réussi à convaincre le public de la nécessité du renversement du gouvernement Pachinian. Ce retour est un fait important afin d’assurer le travail normal du Parlement et de réaffirmer le rôle législatif et délibératif de l’Assemblée nationale, conformément à la Constitution. Même si l’ordre du jour de l’opposition reste toujours centré sur la souveraineté de l’Artsakh, ignorant les multiples facettes politiques et les défis diplomatiques auxquels l’Arménie est confrontée. L’opposition est aussi particulièrement silencieuse sur le rôle de la Russie, sur son reniement de ses obligations d’allié stratégique de l’Arménie. De même sur le rôle de l’OTSC. Autant l’ARF Tashnagtsoutioun travaille en Occident avec les autorités états-uniennes, françaises, de l’Union européenne, et des élus locaux pour la défense des intérêts de l’Arménie, autant en Arménie en tant que membre de l’opposition parlementaire du bloc «Arménie», elle soutient les positions pro-russes. De quoi démontrer une situation complètement contradictoire.
Concernant l’Artsakh, bien que le gouvernement ait donné son consentement à la proposition de la Russie, qui suggérait de remettre les négociations sur la question du statut de l’Artsakh à un moment plus opportun, il n’a pas obtenu une position ferme de la part des Russes concernant le retrait des troupes azerbaïdjanaises des territoires occupés d’Arménie. Cette situation a débouché sur un tout nouveau rapport dans les relations Arménie-Russie, en particulier lors du sommet de l’OTSC tenu à Erevan. L’Arménie a refusé d’en signer la déclaration finale, annonçant que «l’Arménie propose, par décision du Conseil de sécurité collective de l’OTSC, d’accélérer le travail politique et diplomatique nécessaire avec la partie azerbaïdjanaise, afin d’obtenir le retrait immédiat et inconditionnel des troupes azerbaïdjanaises du territoire souverain de l’Arménie, à leurs positions initiales du 11 mai 2021.» Et Pachinian de déclarer : «Je trouve que la déclaration actuelle concernant la fourniture d’assistance à l’Arménie n’est pas suffisamment élaborée, et je ne suis pas prêt à la signer sous cette forme maintenant.» Une prise de position inattendue qui a choqué les présidents de la Russie et de la Biélorussie.
Profitant de cette position de l’OTSC et de la Russie, Aliyev a annoncé que la rencontre prévue le 7 décembre à Bruxelles n’aura pas lieu en raison de la position de la partie arménienne. Il a souligné que «Pachinian n’accepte de se rencontrer qu’avec la participation du président français Macron.» L’Azerbaïdjan a commencé à exploiter très astucieusement les contradictions et les conflits d’intérêts stratégiques qui ont surgi entre les pays occidentaux, en particulier les États-Unis et la France. Apparemment, la position ferme de l’Iran envers l’Azerbaïdjan concernant le tracé de sa frontière avec l’Arménie et les révoltes à l’intérieur du pays obligent les États-Unis à considérer l’Azerbaïdjan comme un partenaire stratégique, comme ce fut le cas avec la présidente de la Commission européenne, Ursula Van Der Leyen, qui a fait une telle déclaration lors de la signature de l’accord gazier. Les Etats-Unis encourage les négociations directes entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, alors que l’Europe organise des rencontres sous l’égide de Charles Michel et Emmanuel Macron. Parmi les pays occidentaux, la France reste la seule dont la médiation est encore considérée par Aliev comme pro-arménienne. C’est sur l’insistance du président Macron que la mission d’observation civile de 40 membres de l’Union européenne a été lancée. Le vote de la résolution du Sénat français pour soutenir l’Arménie et l’Artsakh et les discussions récentes d’une résolution similaire à l’Assemblée nationale ont fait de la France la première cible de l’Azerbaïdjan. Ces contradictions au sein des États occidentaux et leur opposition à la Russie et à l’alliance militaire de l’OTSC, donnent à l’Azerbaïdjan l’occasion inouïe d’intensifier, jour après jour, ses attaques frontalières.
J. Tch.