Le secrétaire d’État Anthony Blinken, résumant les résultats des négociations tripartites et bilatérales avec les ministres des Affaires étrangères d’Arménie et d’Azerbaïdjan à Washington, a noté que les parties avaient discuté, ces derniers jours, de questions difficiles et réalisé des progrès substantiels sur la question du traité de paix. « L’accord final sera historique et sera dans l’intérêt de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan », a-t-il déclaré. Ajoutant que « le dernier kilomètre d’un marathon est toujours le plus difficile, mais les États-Unis sont là pour aider nos amis à atteindre la ligne d’arrivée ».
Mais le Premier ministre Pachinian, faisant référence aux négociations de Washington à Prague, a été très déçu, affirmant que les parties sont toujours en désaccord sur les sujets essentiels, et que si auparavant, il y avait une distance d’un kilomètre entre les points de vue, il y a maintenant 990 mètres. En un mot, aucun progrès tangible.
Faut-il, finalement, prendre au sérieux la médiation occidentale du processus de négociation arméno-azerbaïdjanaise ? Les résultats obtenus sont tellement ridicules, pour ne pas dire honteux, pathétiques. Depuis l’attaque du territoire souverain de l’Arménien septembre dernier, qui a fait près de 300 morts et 200 blessés, jusqu’au siège des pseudo-écologistes, la non-exécution de l’arrêt de la Cour Internationale de Justice, l’assassinat de trois policiers d’Artsakh, l’attaque surprise d’un groupe de militaires sous prétexte de négocier lors de la démarcation frontalière du village de Tegh, lequel a fait quatre morts, jusqu’à l’installation d’un nouveau poste frontière sur le pont de Hakar qui se trouve dans le couloir des forces de maintien de la paix russe selon l’accord du 9 novembre 2020. Bref, une situation sur le terrain qui empire de jour en jour. Et pourtant, les diplomates occidentaux, les hommes politiques, les responsables gouvernementaux continuent naïvement d’insister sur le fait que le conflit est proche de sa résolution avec un peu de bonne volonté bilatérale. Comment l’Arménie et l’Azerbaïdjan peuvent-ils se mettre d’accord lorsqu’aujourd’hui leur relation rappelle la fable du Loup et de l’Agneau. L’Arménie défaite déclare constamment qu’elle est prête à signer un traité de paix, mais l’Azerbaïdjan victorieuse dit qu’il n’y aura pas de paix tant que les Arméniens ne se rendront pas, tant qu’ils ne quitteront pas le Haut-Karabakh, tant que le couloir du Zanguezour ne sera pas offert.
En un mot, les pourparlers de Washington organisés par Blinken n’ont été qu’un fiasco que le secrétaire d’Etat tente de déguiser en réussite. Quatre jours de négociations, autant de moyens et de temps, sous l’égide de l’Etat le plus puissant du monde, sans qu’il soit capable de tracer une feuille de route pour un accord de paix ? Cela prouve qu’il y a soit une erreur fondamentale, soit un leurre. La divergence des positions entre les deux parties est si grande qu’il n’y a aucune possibilité pour une solution immédiate. Dans un cas comme celui-ci les règles du jeu devraient être imposées. Sinon, cela prouve que le but du pays hôte était tout autre : résoudre son propre problème stratégique et non ceux des parties en conflit. Il est clair que les États-Unis cherchent par tout moyen par tous les moyens à chasser la Russie de la région, et pour cela, il procèdent par étapes : d’abord du processus de négociation, ensuite de l’Artsakh, puis de l’Arménie. Et l’arme utilisée est le dictateur Aliev. Tous les feux verts lui sont accordés pour agir librement. Pas une seule sanction, pas un seul avertissement à un tyran qui a fait taire par la force toutes les expressions démocratiques dans son pays, qui a commis des crimes de guerre… En Artsakh, il crée une situation humanitaire insoutenable, il procède à des attaques armées en permanence afin de créer une situation de panique pour in fine obliger les habitants à quitter le pays. Une fois les Artsakhiotes partis la présence de l’armée russe devient superflue.
Après l’échec des négociations de Washington, les regards seront tournés vers Bruxelles puis vers Moscou, où les dirigeants des deux pays iront négocier. Combien de temps la Russie tolérera-t-elle les discrédits d’Aliev ? De quelles armes diplomatiques et politiques dispose Poutine pour imposer son plan de paix ? L’épée de Damoclès est également suspendue au-dessus de la tête des Russes.
J. Tch.