Les Arméniens d’Artsakh vivent des jours d’une infinie agonie. Et tous les Arméniens, inquiets et impatients, suivent l’actualité politique. Les centres de pouvoir internationaux et sud-caucasiens continuent de prendre des décisions et font des déclarations contradictoires, sans aucun impact direct sur la situation.
Après la réunion Michel-Pachinian-Aliev à Bruxelles, le 15 juillet dernier, la proposition de transport de fret Aghdam-Stepanakert qu’Aliev a présentée pour résoudre le problème du blocus de l’Artsakh a reçu une réponse positive des cercles européens. Les autorités de l’Artsakh ne se sont cependant pas empressées d’accepter cette solution simplement parce qu’elle visait à appliquer le plan occidental d’inclusion de l’Artsakh comme faisant partie intégrante du territoire de l’Azerbaïdjan et aussi cela contredisait les intérêts russes en Artsakh.
Samuel Babayan, le président de l’une des principales forces politiques de l’Artsakh, – le parti «Patrie unie» a exprimé son soutien à cette solution. Il a affirmé que le peuple d’Artsakh doit accepter la nouvelle situation politique de l’après-guerre et doit engager un dialogue direct avec les Azerbaïdjanais. Les rumeurs disent que l’ancien secrétaire du Conseil de sécurité d’Artsakh, Vitaly Balassanian, est aussi du même avis. La semaine dernière, les médias locaux ont diffusé une information qui faisait état de son arrestation par les autorités d’Artsakh, mais qu’il avait ensuite été relâché.
Cette position de Samuel Babayan est plutôt en cohérence avec la position des autorités arméniennes, qui encouragent des négociations directes entre l’Artsakh et l’Azerbaïdjan sous l’égide de la communauté internationale. « Sous l’égide de la communauté internationale » est naturellement le format contraire aux attentes des autorités russes. En formulant cette option pro-occidentale, les autorités arméniennes veulent, sans aucun doute, rappeler à la partie russe son obligation vis-à-vis des Arméniens d’Artsakh, contractée lors de la signature de l’accord tripartite du 9 novembre 2020.
Le Premier ministre Nikol Pachinian a déclaré dans un article publié dans le journal Le Monde : « Une paix stable dans le Caucase du Sud, est possible, mais seulement avec le soutien actif du monde civilisé. La communauté internationale doit prendre des mesures audacieuses de style Sarajevo pour mettre fin au siège du Haut-Karabakh. » Mais les Occidentaux encouragent plutôt l’utilisation de la route Aghdam-Stepanakert proposée par Aliev. Comme il n’y a pas de soutien résolu de la part de ces derniers pour l’ouverture du couloir de Berdzor, mais à la place la poursuite d’une politique délibérément anti-russe, la Russie ne se précipite pas pour trouver une solution rapide et maintient le corridor de Berdzor fermé. Au contraire, elle a profité de cette occasion pour forcer l’Arménie à consentir à l’ouverture du corridor de Syunik reliant l’Azerbaïdjan au Nakhitchevan, qu’elle promeut depuis les premiers jours de la guerre de 44 jours, en échange de la libre communication du corridor Arménie-Artsakh.
À cet effet, elle a organisé la réunion trilatérale des ministres des Affaires étrangères – russe, arménien et azerbaïdjanais – à Moscou, afin d’envisager une solution urgente, en particulier pour la partie russe : remettre sur la table celle du couloir de Syunik. Une solution qui n’est pas du tout du goût de l’Iran. Ce dernier, mécontent des développements récents, a organisé une réunion urgente avec le ministère arménien des Affaires étrangères, avant que celui-ci ne se rende à Moscou, et lors de la conférence de presse, il a réitéré son refus de tout changement indésirable de la frontière du nord de l’Iran. Et contre toute attente, il a rappelé sa préférence pour le format 3+3, comme solution. Un format que la Turquie avait initié à la fin de la guerre de 44 jours. Celle-ci bannissant complètement la participation de l’Occident dans la résolution du conflit du Haut-Karabakh, limitant la résolution de la question d’Artsakh aux trois principaux acteurs de la région : la Russie, l’Iran et la Turquie.
J. Tch.