La politique intérieure arménienne sous tension, la douleur de la perte de l’Artsakh, les menaces de guerre, les prisonniers comme autant d’otages à Bakou, les réfugiés de l’Artsakh, l’instabilité géopolitique régionale et internationale, le dérèglement climatique… Les crises politiques nationales comme internationales avaient relégué au deuxième plan la vivacité de la vie culturelle, nous avaient fait oublier les acteurs du monde culturel qui ont continué à exercer leur art dans les conditions difficiles, nous donnant l’occasion d’appréhender le monde sous un angle différent.
La 8e édition du festival culturel Est-ouest, «Un week-end à l’est» est consacré à Erevan, la capitale d’Arménie, à sa vie culturelle, comme à sa production artistique et au travail d’un certain nombre d’artistes de la diaspora arménienne loin de l’Arménie et de sa capitale. Un festival inattendu et surprenant, que les organisateurs avaient prévu dans un premier temps de le consacrer à la Lituanie, mais c’est le nettoyage ethnique de l’Artsakh réalisé par l’Azerbaïdjan en septembre dernier, qui les a conduits à la découverte de la culture arménienne.
Le mercredi 20 novembre a sonné l’ouverture officielle d’« Un week-end à l’Est » au théâtre de l’Alliance Française, en présence d’André Manoukian, parrain de la cérémonie, qui a ouvert le festival avec un ensemble de musiciens invités, et de la danseuse-chorégraphe Rima Pipoyan, marraine de la cérémonie, fondatrice du premier groupe de danse contemporaine d’Arménie.
Tout au long de ce festival, un événement riche, varié, même éblouissant, étalé sur une dizaine de jours, du 20 au 30 novembre, Paris est devenu le centre de la culture arménienne. Pour les fondateurs du festival « Un week-end à l’Est », il s’agit de tisser des rencontres entre l’Orient et l’Occident par la médiation des différents moyens de l’art et de la culture ; de révéler un monde ce qui a été et ce qui reste, depuis des siècles, le lieu de rencontre et d’affrontements entre l’Orient et l’Occident. Plus de 50 événements : musique, danse, art du mouvement, exposition, théâtre, littérature, parole, table ronde, avec la participation de plus de 100 artistes et intellectuels, qui se consacrent à l’art arménien, à son expression, présents dans plus de 50 centres culturels parisiens. C’est un cadeau du ciel, une délivrance pour ceux qui vivent mal les tensions permanentes et les guerres. Il fait bon pour une fois de parler de l’Arménie sur un tout autre registre que les malheurs et les tragédies. Il est même rare de vivre et de profiter d’une telle atmosphère artistique à Erevan.
Le public parisien doit cette magnifique programmation du festival « Un week-end à l’Est » au professionnalisme du comité d’organisation. Contrairement aux idées reçues, le festival n’est pas le fruit d’une initiative gouvernementale, mais il a été cofondée par Vera Michalski-Hoffman, propriétaire d’une dizaine de maisons d’édition. Cette dernière porte une attention particulière à la littérature et aux arts des pays d’Europe de l’Est, en souvenir de son mari Ian Michalski, d’origine polonaise.
Des journées dédiées à la culture française, allemande et américaine sont régulièrement organisées à Erevan, à l’initiative des ambassades locales et financées par elles. « Un week-end à l’est » à Paris porte un regard sur un peuple vivant sous la menace de la guerre. La découverte de nouvelles œuvres aux côtés de celles de Paradjanov, de Pelechian, d’Aznavour et d’autres artistes reconnus est une belle démonstration de la vitalité de la jeunesse en Arménie, une expression de sa créativité et de sa confiance dans l’avenir.
J. Tch. ■
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