L’accueil respectueux réservé par l’archevêque Vazguen Mirzakhanian, primat du diocèse arménien des Etats baltes, au Premier ministre d’Arménie Nikol Pachinian dans l’église Saint-Grégoire l’Illuminateur de Tallinn, en Estonie, a suscité une vive réaction du Catholicos d’Etchmiadzine, Karekine II. Quelle est donc la faute commise par Son Éminence ? Ce serait sa déclaration : « Notre prière, Monsieur le Premier ministre, est que vos projets de paix et de réconciliation entre notre Arménie et ses voisins soient couronnés de succès… ». Le Saint-Siège a condamné la position de ce haut dignitaire ecclésiastique pour avoir souhaité le succès du programme de paix du chef du gouvernement arménien.
C’est peut-être la première fois depuis la guerre de 2020 qu’un haut dignitaire de l’Église apostolique arménienne ose prier pour le succès de la ligne politique du gouvernement arménien. De plus, Son Éminence Mirzakhanian a ajouté : « Notre prière, celle de croyants, de citoyens, et aussi d’un guide spirituel d’un pays européen, est que notre pays, l’Arménie, fasse les pas nécessaires le menant vers l’Union européenne ». En tant que primat d’un diocèse d’un pays membre de l’UE, le positionnement politique de l’archevêque est compréhensible. Mais, il n’est nullement en accord avec les positions politiques pro-russes de Karekine II. Le Saint-Siège déclare : « Certaines idées et jugements exprimés par le Primat diocésain sont hautement subjectifs, individuels et ne peuvent être attribués à l’Église. En exprimant des évaluations sur n’importe quelle question, surtout lorsqu’il n’existe pas de position officielle de l’Église, les ecclésiastiques doivent certainement faire preuve de circonspection et de prudence pour ne pas donner lieu à des interprétations erronées. »
Un avertissement remarquable, alors qu’il n’y a pas longtemps, le « Mouvement sacré » de l’archevêque Bagrat Galstanian n’a jamais fait l’objet d’une telle réaction en son temps. Pourquoi ? Tout simplement, parce qu’il servait les intérêts de la Russie et des forces pro-russes en Arménie.
Un autre phénomène notable a été porté à l’attention du public par Ara Sanjian, directeur du Centre d’études arméniennes de l’Université du Michigan-Dearborn et professeur d’histoire, le 26 avril sur sa page Facebook, sous le titre « Laissant les commentaires aux lecteurs… ». Le problème concerne le contenu des communiqués d’Etchmiadzine et d’Antelias concernant la participation des deux Catholicos de l’Église apostolique arménienne aux obsèques du Pape de Rome, où le Saint-Siège d’Etchmiadzine ignore complètement la présence du Catholicos Aram Ier de la Grande Maison de Cilicie et de sa délégation : « La délégation accompagnant le Catholicos de tous les Arméniens comprend Son Excellence Khajag archevêque Barsamian, délégué patriarcal pour l’Europe occidentale et représentant du Catholicos de tous les Arméniens au Vatican, Son Excellence Archak archevêque Khachatrian, chancelier du Saint-Siège d’Etchmiadzine…»
Tandis qu’Antelias communique ce qui suit : « Sa Sainteté Aram Ier a participé aux funérailles. À ses côtés étaient également présents le Révérend Père Bsag Tepirdjian, étudiant au Vatican… Notons que Sa Sainteté le Catholicos Karekine II, a également participé aux funérailles, accompagné de pères de la confrérie. Pendant les funérailles aussi bien que pendant le séjour au Vatican en général, les deux vénérables patriarches ont participé ensemble à ladite cérémonie ecclésiastique. Ils ont également eu l’occasion de se consulter sur des questions liées à l’église arménienne, à l’Arménie et aux Arméniens en général. »
L’incapacité des deux catholicossats à montrer une approche unitaire est patente. Mais ces communiqués révèlent l’absence de considération de la part du Saint-Siège envers le Catholicos de la Grande Maison de Cilicie, une attitude irréconciliable avec les déclarations faites depuis les autels comme le respect des valeurs nationales, et pour une action dans un esprit d’unité.
J. Tch. ■
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