TURQUIE – Une journaliste turque poursuivie en justice pour un article sur le Génocide arménien

La journaliste turque et rédactrice en chef de « Bianet », Tugce Yilmaz, a été traduite en justice en vertu de l’article 301 du Code pénal turc, qui sanctionne « l’insulte à la turcité ». La cause en est un article publié le 24 avril 2024, dans lequel deux jeunes Arméniens d’Istanbul, Aren et Zépur, s’exprimaient avec franchise sur leur identité, leur culture et l’héritage du Génocide arménien.

L’affaire a été initiée à la suite d’une plainte anonyme accusant Mme Yilmaz d’avoir employé le mot « génocide » et d’avoir couvert les expériences vécues par les Arméniens vivant en Turquie. Cette plainte a conduit à l’arrestation de la journaliste et à son placement en garde à vue pour une nuit.

Le contenu de l’article

Dans l’article intitulé « Les jeunes arméniens s’expriment : un deuil de 109 ans », les jeunes interrogés racontaient les difficultés de demeurer Arménien en Turquie. Aren (27 ans) y décrivait comment il avait été contraint de dissimuler son identité, d’éviter de parler arménien dans les lieux publics et la peur qu’il avait ressentie durant son service militaire, en évoquant le souvenir du meurtre de Sevag Balikci. Zépur (27 ans), quant à elle, soulignait l’importance de préserver la langue arménienne ainsi que les mémoires familiales liées à la résistance du Musa Dagh.

Le procès

Des représentants d’organisations internationales de défense de la liberté de la presse étaient présents lors de la première audience. Pour sa défense, Mme Yilmaz a déclaré que les poursuites engagées contre elle constituaient un « acte flagrant d’intimidation » et qu’elle était ciblée pour avoir accompli son devoir de journaliste. Elle a rappelé le cas de Hrant Dink, qui avait également été jugé en vertu de l’article 301 avant d’être assassiné.

Les avocats ont soutenu que la procédure était illégale, car fondée sur une plainte anonyme et ouverte après l’expiration du délai légal de prescription. Malgré ces objections, le juge a refusé de clore le dossier. La prochaine audience a été fixée au 21 avril 2026. 

Éditorial