Que font les forces russes de maintien de la paix ?

À peine quelques jours après que les derniers soldats des Forces armées arméniennes aient quitté l’Artsakh, les troupes azerbaïdjanaises ont lancé une attaque en direction de Berdzor, prétextant le refus des Arméniens d’utiliser la nouvelle route construite par l’Azerbaïdjan pour relier l’Artsakh à l’Arménie. L’accord de cessez-le-feu du 9 novembre 2020 stipule que le tracé de la nouvelle route reliant doit être déterminé par les trois parties signataires. Les Azéris ont construit leur segment du nouveau corridor sans consulter les Russes et les Arméniens. Selon les termes de l’accord, cette nouvelle route doit être construite d’ici 2023. Le mois dernier, l’Arménie a commencé les travaux de construction de son tronçon de la route, qui dureront un an.
Dans ces conditions, l’attaque des Azéris profite tout simplement de la guerre russo-ukrainienne pour imposer ses conditions à l’Arménie et à l’Artsakh, violant tous les accords internationaux et les droits de l’homme.
Suite aux derniers événements, les Russes ont reconnu que c’est bien les Azéris qui avaient violé le cessez-le-feu. Cependant, c’est une chose de réagir à la violation des Azéris, mais une autre de faire front pour endiguer l’attaque, ou moins la prévenir. La clause 4 de l’accord de cessez-le-feu du 9 novembre prévoit qu’« un centre de maintien de la paix pour le contrôle du cessez-le-feu [sera] mis en place afin d’accroître l’efficacité de la surveillance du respect des accords par les parties au conflit. » Pourquoi ce centre ne contrôlait-il pas la situation ? Pourquoi aucune demande des Azéris n’est résolue par la consultation, mais toujours par l’action militaire ? L’accord du 9 novembre a mis fin aux hostilités et la partie russe, en tant que garante de l’accord, porte l’entière responsabilité de cette situation. Ce n’est pas la première fois depuis 2020 que lors des attaques contre l’Arménie et l’Artsakh, les forces de maintien de la paix russes se contentent du rôle d’observateur.
Il faut par ailleurs souligner que cette fois, les Forces armées d’Artsakh ont répondu et résisté directement aux attaques, sans avoir naïvement recours à l’intervention des forces russes de maintien de la paix. Si les soldats arméniens ont payé le prix pour leur légitime défense (2 morts et 19 blessés), ils ont néanmoins fait preuve de courage et de résistance. L’ennemi a utilisé des drones d’attaque, des lance-grenades et diverses armes à feu.
Jusqu’à récemment, la partie azérie accusait l’Arménie de ne pas respecter le point 3 de la déclaration du 9 novembre, à savoir le « retrait des forces armées arméniennes » d’Artsakh. Lors de la réunion du gouvernement du 4 août, le Premier ministre Pachinian a précisé que le contingent russe de maintien de la paix avait été déployé parallèlement au retrait des forces armées arméniennes. A présent, l’Azerbaïdjan questionne constamment la présence de l’armée de défense du Haut-Karabakh le long de la ligne de contact. Mais si les troupes russes de maintien de la paix et les Forces armées de l’Azerbaïdjan garantissaient la sécurité de la ligne de contact, l’Armée de défense du Haut-Karabakh n’aurait pas besoin d’y être déployée. Cette nécessité n’est apparue qu’après que l’Azerbaïdjan a refusé de signer le mandat des soldats de la paix et a continué à violer les dispositions de la déclaration tripartite du 9 novembre 2020, qui stipule notamment la cessation de toutes les opérations militaires.
Le Premier ministre a évoqué la question de la sécurité de la ligne de contact de la manière suivante : « Depuis novembre 2020, l’une des directions de notre travail a été de trouver comment garantir l’existence et la sécurité de la ligne de contact. Ce sont des questions qui devraient être résolues dans un format tripartite. Si nous constatons que des solutions dans un format tripartite ne sont pas possibles, nous devrons penser à lancer des mécanismes internationaux supplémentaires. »
Et lors du dernier Conseil de sécurité de l’Artsakh, le président de l’Artsakh, Araïk Haroutiounian, a mis en garde contre un autre dan-
ger : le risque pour le peuple d’Artsakh de perdre confiance dans les forces russes de maintien de la paix.

J. Tch.