Pour la première fois, une manifestation contre les forces de maintien de la paix à Stepanakert

« Soldats de la paix, où est la paix que vous nous avez promise ? » C’est en ces termes que les manifestants s’exprimaient lors de la manifestation organisée sur la place de la Renaissance à Stepanakert.

Les craintes exprimées la semaine dernière par le président de la République d’Artsakh, Arayik Haroutiounian, concernant l’apparition de sentiments négatifs au sein du peuple d’Artsakh face à l’inaction des forces russes étaient loin d’être sans fondement. Pour la première fois, le commandant des forces russes de maintien de la paix, Andrei Volkov, a admis que le contingent russe n’avait pas l’autorisation d’intervenir, ni les moyens. Une déclaration terriblement inquiétante de la part d’une force de maintien de la paix qui fait office de garantie de sécurité pour les centaines de milliers d’Arméniens d’Artsakh qui sont revenus vivre sur leurs terres après le cessez-le-feu de novembre 2020.

Il convient de souligner que, contrairement au Premier ministre arménien, qui a évoqué la semaine dernière l’inactivité de la force de maintien de la paix russe dans un langage relativement diplomatique, cette déclaration n’a pas suscité de réaction sérieuse de la part de l’opposition arménienne, malgré les protestations justifiées des forces d’opposition en Artsakh, comme le montraient les slogans inscrits sur les pancartes : « Soldats de la paix, où est la paix que vous nous avez promise ? », « Nous exigeons l’application de la déclaration du 9 novembre ! », « Arrêtez l’agression de l’Azerbaïdjan ! » ou bien « Rendez-nous Paroukh et Khtsaberd ! ».

Arthur Ossipian, chef du Parti révolutionnaire d’Artsakh et principal organisateur de la manifestation, a déclaré que la vague de protestation et d’inquiétude était née de la rencontre avec le commandant des forces de maintien de la paix, Andrei Volkov. Le commandant n’a donné aucune garantie claire qu’il n’y aurait pas de nouveaux incidents sur la ligne de contact. Selon Ossipian, l’Etat-major du contingent de maintien de la paix les a informés qu’ils ne disposaient pas de moyens et de pouvoirs suffisants pour prévenir et contrer les attaques de la partie azerbaïdjanaise.

De plus, Volkov leur a transmis les deux ultimatums de la partie azerbaïdjanaise : le remplacement du corridor de Latchine par une nouvelle route, et la démilitarisation du Haut-Karabakh. Pour Ossipian, ces deux demandes sont illégales et violent la déclaration tripartite du 9 novembre. Celui-ci s’est dit profondément préoccupé par l’annonce de ces deux ultimatums par la partie russe.

Compte tenu des réactions des puissances occidentales aux affrontements de la semaine dernière, de leurs appels faussement impartiaux à ne pas recourir à la force et à se concentrer sur les négociations, et plus récemment, de leurs accords énergétiques lucratifs avec l’Azerbaïdjan et la Turquie afin d’imposer des sanctions contre la Russie, la partie arménienne s’est vu contrainte d’accepter l’ultimatum azerbaïdjanais et de procéder à l’évacuation de la population des communes de Berdzor et d’Aghavno d’ici le 25 août. Cette fois, les monuments qui risquent d’être détruits par les Azéris seront évacués, car en 2021, le président azerbaïdjanais avait annoncé que les monuments qui ont été construits au cours des trente dernières années seront tous détruits, tandis que les plus anciens seront convertis. Exactement comme cela s’est produit jusqu’à présent, malgré les avertissements et les protestations de la communauté internationale.

Face à ces événements, la seule réaction positive de la partie russe a été d’avoir officiellement reconnu que c’est la partie azerbaïdjanaise qui était à l’initiative des hostilités. Cependant, il est surprenant et très inquiétant que les gardes-frontières russes aient étendu leur influence le long de la frontière iranienne, sous prétexte que le trafic de stupéfiants et de substances psychoactives (hachisch, amphétamine, héroïne) entre l’Iran et l’Arménie avait augmenté. C’est peut-être la préparation de l’ouverture de la route Azerbaïdjan-Nakhitchevan sans l’annoncer ouvertement.

J. Tch.