« Le président azerbaïdjanais Aliev doit répondre de ses crimes devant la justice internationale »

TRIBUNE – Alors que Bakou entame des « procès » contre les dirigeants du Haut-Karabakh, Mourad Papazian et Ara Toranian, coprésidents du Conseil de coordination des organisations arméniennes de France, appellent à traduire le président Aliev devant la Cour pénale internationale.

Dans le prolongement des pratiques et des visées à caractère génocidaire à l’encontre des Arméniens de la République du Haut-Karabakh, les autorités azerbaïdjanaises ont annoncé le début des « procès » contre les dirigeants politiques et militaires de l’Artsakh, le 17 janvier, à Bakou. Compte tenu du caractère autocratique et raciste du régime d’Ilham Aliev – comme le documentent notamment les rapports de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) et du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale des Nations unies (CERD) –, les verdicts de ces « procès » ne font hélas aucun doute.

La justice azerbaïdjanaise, déjà qualifiée de « discriminatoire et arbitraire » par le Quai d’Orsay lors de la condamnation injuste du citoyen français Théo Clerc en septembre dernier, ne saurait offrir aucune garantie d’équité à l’égard des prisonniers politiques et de guerre arméniens. Ces derniers, traités comme des otages, subissent des traitements dégradants et inhumains, dans une parodie de justice orchestrée à des fins de propagande.

Conformément aux résolutions adoptées à une large majorité par l’Assemblée nationale et le Sénat, après le nettoyage ethnique perpétré par le régime Aliev contre les Arméniens du Haut-Karabakh en septembre 2023, le gouvernement devrait plus que jamais dénoncer « l’arrestation arbitraire des responsables politiques de la République du Haut-Karabakh, représentants légitimes du peuple de ce territoire » et exiger leur libération immédiate « sous peine de sanctions », comme demandé par nos élus.

Considérant :

  1. Les agressions militaires et crimes perpétrés par le régime Aliev contre la population arménienne du Haut-Karabakh ;
  2. La nature génocidaire du blocus de neuf mois imposé à partir de décembre 2022, selon les termes de Luis Moreno Ocampo, premier procureur de la Cour pénale internationale (CPI) ;
  3. L’entreprise de nettoyage ethnique lancée en septembre 2023, ayant entraîné l’exode de 120 000 réfugiés arméniens ;
  4. L’occupation de 200 km² de territoire souverain arménien par l’Azerbaïdjan ;
  5. Les ambitions affichées par Ilham Aliev de violer les frontières de l’Arménie pour créer un « corridor » destiné à opérer une jonction territoriale entre l’Azerbaïdjan, le Nakhitchevan et la Turquie ;
  6. Les incitations à la haine raciale et les menaces répétées de M. Aliev à l’égard de l’Arménie et des Arméniens ;

Nous demandons que le président de l’Azerbaïdjan soit traduit devant la Cour pénale internationale pour ces crimes. Nous invitons le gouvernement à alerter cette instance pour qu’elle se saisisse de ce dossier sans délai.

Alors que nous approchons du 110 anniversaire du génocide arménien, dont la Turquie et l’Azerbaïdjan ambitionnent le parachèvement, nous exhortons la communauté internationale à se mobiliser pour que, dans cette région du monde, dont les États sont membres du Conseil de l’Europe, les mêmes causes ne reproduisent pas les mêmes effets.

Face au silence complice sur cette question essentielle pour les droits de l’Homme, les équilibres régionaux et la paix – y compris en Europe –, nous en appelons à la justice et à la force du droit. Il est plus que temps qu’Aliev réponde de ses crimes devant la Cour pénale internationale et que cessent définitivement les menaces et les persécutions contre ce qu’il reste du peuple arménien.

« Le Figaro Magazine », 16 janvier 2025