L’attention politique et stratégique portée par des acteurs internationaux sur l’Arménie s’accroît. Surtout si l’on considère les terribles menaces proférées, le 7 janvier, par Ilham Aliev à l’encontre des autorités arméniennes, lors de l’interview accordée aux médias locaux : « L’Arménie est un Etat fasciste. Depuis près de 30 ans, ce pays est dirigé par des tenants de l’idéologie fasciste, ce sont donc eux qui ont construit ce pays. C’est pourquoi il est nécessaire de détruire ce fascisme. Soit les dirigeants arméniens le détruiront, soit nous le détruirons. Nous n’avons pas d’autre issue… L’armement de l’Arménie constitue une menace pour toute la région et pourrait conduire à de nouvelles tensions… Le couloir de Zanguezour doit être ouvert et sera ouvert. Plus tôt ils comprendront, mieux ce sera. » Allant encore plus loin, Aliev a exigé l’annulation des accords de vente d’armements avec l’Arménie. Et enfin, il a exigé la dissolution du Groupe de Minsk de l’OSCE.
Face à ces exigences, le gouvernement arménien a décidé de répondre à la demande populaire d’adhésion à l’Union européenne. De plus, il a donné son accord pour prolonger de deux ans la mission d’observation civile de l’UE en Arménie. L’Azerbaidjan a maintes fois dénoncé le rôle déstabilisant de la mission de surveillance dans la région.
Et avec les États-Unis, avant la prise de fonction du nouveau président américain Trump, un accord de partenariat stratégique entre les États-Unis et l’Arménie a été signé à Washington, mardi 14 janvier, par le secrétaire d’État américain Blinken et le ministre des Affaires étrangères arménien, Ararat Mirzoyan. Cet accord offrira une opportunité de coopération économique, de sécurité et de défense, et permettra d’élargir la coopération entre les deux pays dans les domaines de la démocratie et de la justice.
Les réactions des dirigeants russes, face aux initiatives de coopération de l’Arménie avec l’UE et les États-Unis, sont vives, rappelant objectivement les avantages dont bénéficie l’Arménie en tant que membre de l’UEE, notamment sur le plan économique, sans avoir les leviers nécessaires pour arrêter la coopération. À ce titre, il convient de noter la déclaration sarcastique de l’ancien président russe, Dmitri Medvedev : « Je ne serais pas surpris si Pachinian, qui s’est rasé la barbe, se souvient [suite aux déclarations du président azerbaïdjanais] que l’Arménie est membre de l’OTSC. »
L’Iran, en revanche, malgré son différend avec l’Occident, reste constant dans sa prise de position en faveur de l’Arménie. Le secrétaire du Conseil de sécurité iranien a réitéré, lors de la rencontre avec Pachinian à Erevan, que Téhéran soutenait la mise en œuvre du projet «Carrefour de la paix» sur la base des principes qui y sont établis.
Le 8 janvier, le Premier ministre Pachinian a répondu aux menaces d’Aliev sur sa page Facebook, en publiant un message en 12 points, résumant les différentes propositions et prises de position, lors des pourparlers de paix du gouvernement arménien avec l’Azerbaïdjan, apportant des précisions importantes notamment sur certains points sensibles de la rhétorique d’Aliev concernant
« l’Azerbaïdjan occidental » et « l’Arménie occidentale », « l’Arménie orientale », rappelant que la question des réfugiés ne doit pas être associée au retour à «l’Azerbaïdjan occidental ». Il a insisté sur la nécessité de faire cesser le discours guerrier envers l’Arménie et d’accepter la proposition de la République d’Arménie pour une paix à long terme dans la région.
Le douzième et dernier point fait référence à la dissolution du Groupe de Minsk, lorsque les problèmes créés au cours de trente ans de conflit seraient résolus.
Il est évident que le développement de la stratégie multipolaire du gouvernement arménien doit être évaluée sur le long terme. L’évaluation des experts du centre d’analyse américain Stratfor sur son efficacité à court terme n’est pas du tout positive : « Les tentatives de l’Arménie pour obtenir un soutien sérieux des États-Unis en 2025 échoueront. Les liens étroits avec l’Azerbaidjan sont une priorité pour l’administration Trump en tant que contrepoids local à l’influence régionale de la Russie, de l’Iran et de la Chine. »
J. Tch. ■
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