Le 25 janvier, au lendemain de son retour de Zurich, le Premier ministre Nikol Pachinian a accordé une interview à Bedros Ghazarian sur la télévision publique. Si le sort des prisonniers arméniens détenus à Bakou suscite l’unanimité dans le monde arménien, il a également abordé de nombreux autres sujets, notamment des thématiques qui divisent les Arméniens, en particulier au sein de la diaspora :
« L’Arménie dispose de renseignements indiquant que l’Azerbaïdjan utilise des moyens psychotropes interdits contre les prisonniers arméniens à Bakou pour leur extorquer des aveux visant à provoquer des escalades régionales. Je ne considère aucun de ces prisonniers comme mon opposant politique. Au contraire, nous sommes conscients que ce qui se passe est non seulement préoccupant mais sera et est utilisé pour provoquer de nouvelles escalades dans la région », a déclaré Pachinian, assurant que tous les moyens disponibles sont utilisés pour résoudre ce problème.
Selon le Premier ministre « la Diaspora est née de la patrie qui n’est plus la nôtre. Ils vivent avec cette idée, cette foi. Une personne vit en Australie et rêve de retourner un jour dans le lieu de naissance de ses ancêtres. Quel rapport avec la République d’Arménie ? », s’est-il interrogé.
« Pour les réformes de l’armée, le discours sur l’Ararat et l’Aragatz est très important. Si nous réformons l’armée sous le discours de l’Ararat et de l’Arménie historique, nous ne pouvons pas avoir une armée efficace ni acheter des armes. Si nous allons avec l’image de l’Ararat demander des armes, personne ne nous en donnera car ils ne voudront pas entrer en conflit avec la Turquie à cause de nous. N’est-ce pas évident ? »
« Notre identité est liée à la République d’Arménie. Dans le monde moderne, les identités sont liées aux États. L’État est le moyen d’assurer l’identité : avec un État, vous avez une identité, sans État, pas d’identité. Le reste est un mythe. La patrie est l’État. Il n’y a pas de patrie hors de l’État. Si nous voulons être un État indépendant, nous devons identifier patrie et État, nous concentrer sur l’État et ses intérêts sans prétendre prendre des territoires internationalement reconnus d’autres pays. »
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Ajoutons que, la veille, le 24 janvier, le Premier ministre, dans le cadre de son voyage en Suisse pour participer au Sommet international de Davos, a rencontré les représentants de la communauté arménienne de Suisse, à Zurich. Lors de cette rencontre, Pachinian a également fait des déclarations qui ont suscité des réactions. Voici quelques-uns des sujets abordés par le Premier ministre arménien :
« Le Génocide arménien fait indéniablement partie de notre identité. Mais nous devons revoir non seulement notre perception du Génocide arménien, mais aussi la façon dont nous en parlons », a déclaré le Premier ministre.
Interrogé sur la place du Génocide dans l’identité nationale et la politique d’État, Pachinian a répondu :
« Nous devons comprendre ce qui s’est passé et pourquoi. C’est une question stratégique, pas seulement historique. Pourquoi le Génocide n’était pas à l’agenda international en 1939, mais y est apparu dans les années 1950 ? Comment l’avons-nous perçu, par qui, et quelles conclusions en avons-nous tirées ? »
Il a souligné que le sujet doit être étudié par des politologues et stratèges, pas seulement des historiens : « Nous devons avoir une position claire sur ce que nous voulons dire au monde concernant le Génocide. Cela demande action, pas seulement discours. »
« La gestion de notre identité est fondamentale. Nous devons nous demander ce que signifie être un peuple ayant survécu au génocide, et comment l’utiliser comme force motrice plutôt que source permanente de douleur », a-t-il conclu.
Selon le Premier ministre, « les relations entre l’État et l’Église sont globalement comme elles devraient être. L’État ne doit pas s’immiscer dans les affaires de l’Église, et vice-versa. »
« L’émigration de la Diaspora est plus importante que celle d’Arménie. Quand une personne d’origine arménienne ne parle plus arménien, ne vit plus selon les traditions arméniennes, même si elle garde son nom de famille mais ne s’identifie plus à la nation arménienne, c’est une émigration. Il n’y a jamais eu autant d’émigration en Arménie qu’il y en a maintenant dans la Diaspora. La seule façon de sauver la Diaspora est la République d’Arménie », a-t-il martelé.
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