Chaque jour, la lecture de la presse d’Arménie livre son lot de nouvelles désolantes et d’inquiétudes, parfois de répulsion et de révolte tant ce que l’on y découvre peut être affligeant.
Combien de lecteurs consultent ces sites parfois nauséeux et quel est leur impact sur une société déjà très meurtrie par les guerres d’agression subies depuis 2020 ?
Difficile de se prononcer, mais dans tous les cas, l’état de la presse en Arménie est cruellement révélateur de la situation générale du pays.
Comment cette société profondément traumatisée qui s’apprête aujourd’hui à prendre des décisions capitales pour son avenir peut-elle réfléchir sainement et agir de manière « intelligente » lorsque sa presse est dans un état aussi lamentable ?
Certes l’héritage soviétique pèse encore lourdement sur le paysage médiatique arménien, mais trente-trois ans se sont écoulés depuis l’effondrement de l’Union soviétique et l’indépendance du pays et nous n’avons malheureusement pas assisté à l’émergence d’une presse digne de ce nom.
Les grands médias de la période soviétique comme le mastodonte « Hayasdani hanrabedoutioun » [République d’Arménie] qui livrait chaque jour la doxa officielle aux citoyens convoqués de manière quasi-rituelle aux kiosques à journaux ont certes disparus, mais l’héritage de la période – la formation des journalistes, la rétribution à la ligne ou à la page, le recours à des pigistes souvent dépourvus de formation et peu au fait des principes déontologiques de la profession- est toujours là. A cela s’ajoutent l’émergence et la tyrannie des « réseaux sociaux » et, dans le contexte actuel de l’Arménie, le travail de déstabilisation de la société et de l’Etat arménien engagé par certains groupes de « l’opposition » parlementaire et extra-parlementaire.
Cette imitation de presse qui œuvre avec l’aide, voire sur la commande, de certains Etats étrangers, livre chaque jour son lot de nouvelles dans lesquelles on trouve à la fois « à boire et à manger » . Nombre d’entre eux sont directement, ou indirectement, contrôlés par des oligarques de l’ancien régime le plus souvent « réfugiés » en Russie (Nous avons, nous aussi, au choix, nos « Emigrés de Coblence » ou nos « Relocalisés »).
Parmi ces médias, « Hraparak » est sans doute le plus calamiteux comme l’atteste « l’article » qui figure ci-dessous et que je livre aux lecteurs de « Nor Haratch » sans aucun commentaire. J’ose néanmoins affirmer qu’il est une véritable offense à l’intelligence, un monument d’inculture, mais surtout d’ignominie et de manipulation. Il constitue de plus, le fait n’est pas anodin en ce Jeudi-Saint, une crapuleuse manipulation de la Religion et des convictions des croyants.
A sa lecture, on ne peut que s’interroger sur les motivations de son auteur. Mais celui-ci demeure courageusement anonyme puisqu’aucune signature n’apparait, ni en tête, ni au bas du texte. On peut également s’interroger sur la responsabilité du propriétaire et de la direction du journal qui, en assurant la publication d’un papier calomniateur et raciste sans aucune signature, endosse de fait la responsabilité de son contenu. Partout dans le monde, cela s’appelle assumer une « ligne éditoriale ». Si c’est le cas, il faut que la Justice arménienne fasse son travail en demandant des explications à Mme Herminé Ohanian qui est la directrice de cet organe de presse.
Il y a quelques jours, M. Edik Andréassian, journaliste au même journal avait publié une diatribe dirigée contre le Président Macron. Il lui reprochait en particulier sa complicité avec M. Nikol Pachinian et avait eu ces propos pour caractériser l’action de ce dernier : « Nikol saute dans les bras d’à peu près tout le monde dès lors qu’il aperçoit des bras tendus. Il y a quelques mois, il s’était jeté dans ceux de Scholz. A Prague, il serait tombé dans les bras d’Aliev et d’Erdogan, s’il n’était la jalousie de Macron qui était présent. Combien de fois s’est-il jeté dans les bras de Poutine … Pour la faire brève, Nikol est un partenaire bien imprévisible. Il est prêt à tout, juste pour conserver son fauteuil. Il bradera, cédera, détruira et anéantira tout, remplira les prisons de gens, pourvu que rien ne menace son pouvoir ».
A la lecture de ce nouveau « papier » publié par son journal, on peut se demander quel prix l’opposition et sa presse sont prêtes à payer pour renverser Nikol Pachinian et ramener au pouvoir les oligarques de la kleptocratie renversée par la révolution populaire de 2018.
En ce jeudi Saint, jour de la trahison de Judas et de la Passion du Christ, cet « article », si on peut parler d’article, ne constitue-t-il pas une véritable « baiser de Judas » donné au peuple arménien, mais surtout un magnifique cadeau à Ilham Aliev qui ne cesse de mettre en avant la « vie heureuse» de la communauté juive de son pays tout en présentant l’Arménie et les Arméniens comme des antisémites patentés ?
Qui sont les véritables Judas dans cette histoire ?
Sahak Sukiasyan
jeudi 28 mars 2024
Le texte de Hraparak
Les médias arméniens rapportent qu’un nouveau scandale explosif murit en Arménie ces jours derniers. Il s’avère que par décision du Premier ministre Nikol Pachinian dans le centre d’Erevan, sur la rue Toumanian, au cœur de la capitale, de nombreux arbres vieux de 70 à 80 ans sont coupés pour être remplacés par des centaines d’arbres de Judée provenant d’Israël (sic !).
Pourquoi cet arbre provenant d’Israël s’appelle-t-il « arbre de Judée » ?
Selon les experts, son nom scientifique s’ancre dans la croyance que Judas Iscariote, l’idole des Juifs, se serait pendu aux branches de cet arbre après avoir trahi Jésus-Christ. Nous connaissons la légende selon laquelle Judas s’est pendu à cet arbre, ce qui a donné à ses feuilles et à ses baies une odeur extrêmement forte et désagréable, et qui ne peut pas de ce fait être utilisé à des fins domestiques. Les spécialistes soulignent qu’en plus de la puanteur, cet arbre est également plein de désagréments pour les quartiers urbains densément peuplés. Mais c’est de cet arbre que Nikol Pachinian a décidé de « décorer » le centre de la capitale. On parle de plusieurs centaines de sujets de cette essence.
Pourquoi l’actuel Premier ministre de l’Arménie a-t-il choisi cet arbre parmi des milliers d’arbres existant dans le monde ? Difficile à dire … Il n’y a pas d’explication officielle convaincante à cela. Par conséquent, nous devons nous contenter des nouvelles non officielles et très tenaces qui circulent en Arménie. Selon ces nouvelles, l’ordre de défigurer Erevan par la plantation de ces arbres « maudits » et puants a été reçu d’Israël et des États-Unis. Nous aurions affaire à un rituel caché de fameuses «loges » qui ne peuvent être compris que par des gens « initiés ». Il s’agirait de moquer le peuple arménien et tout ceci aurait une signification profonde … son but serait de déposer sur les « tombes arméniennes » cette « fleur » puante importée d’Israël.
Espérons que le gouvernement de la République d’Arménie finira par expliquer à une société arménienne sidérée pourquoi on dilapide d’énormes ressources, non pas pour s’occuper des nombreux problèmes des artsakhiotes qui ont perdu leurs foyers, mais pour profaner la capitale arménienne.
L’article tel que publié dans « Hraparak » :
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