ARTSAKH – Un danger mortel nous menace

Interview de Mgr Vrtanes Aprahamyan au journal en ligne « 168 Jam », publié sur le site diocésain de l’Artsakh.

 – Votre Sainteté, dans l’une de vos dernières interviews, vous avez déclaré que les gens vivant en République d’Arménie pourraient au moins appeler leurs amis et connaissances vivant en Artsakh pour leur parler. En plus de téléphoner, que peut faire chaque citoyen de la RA pour l’Artsakh et ses 120 000 habitants ?

 – J’ai parlé de téléphoner en Artsakh afin que les gens comprennent ce qui s’y passe. Pour qu’ils téléphonent et qu’ils recueillent des informations au sujet de leurs amis et de leurs proches. Appeler les gens d’Artsakh est l’une des possibilités de les soutenir psychologiquement et moralement. Ces appels peuvent accroitre l’énergie et modifier l’humeur d’une personne. Si vous appelez une personne et lui proposez votre aide, c’est un acte qui la réconforte. Lorsque quelqu’un est alité à l’hôpital et que personne ne lui rend visite, il demeure l’œil rivé à la porte de sa chambre.

 Mais un phénomène incompréhensible et inexplicable se produit de nos jours qu’on ne peut comprendre en tant qu’Arménien, en tant que Chrétien héritier d’une histoire millénaire, ontologiquement doté d’une grande capacité de résistance.
 Il semblerait que les victimes ne perçoivent plus les catastrophes qu’elles endurent. Les gens semblent tétanisés. Ils ont besoin d'être réveillés. J’ignore comment on pourrait le faire. N’étant pas psychologue, je ne peux le dire. Mais même confrontés à cette situation, nous constatons que les réponses que devrait donner la nation ne sont définitivement pas données.
 L'Artsakh est dans une telle situation que nous n'avons pas le droit de perdre ne serait-ce qu’une minute. Tout retard aura des conséquences catastrophiques. Quand l'ennemi nous voit réagir de la sorte et que nous ne ripostons pas, il a l'impression que nous sommes résignés, prêts à mourir ici. On dirait que la victime est conduite à l'abattoir, qu’elle est prête à mourir et qu’elle ne fait que regarder son bourreau d’un regard triste. 
 Nous n'avons pas le droit de vivre de cette manière. C'est une chose incompréhensible pour les hommes d'Église, comme pour les hommes politiques et pour les gens « ordinaires ». Nous devons absolument imaginer en tant que nation une réponse afin de faire face à tout cela. 
 S'il se trouve des responsables, qu'ils aient du courage, qu’ils s’avancent et qu’ils répondent de manière appropriée à tout cela afin que nous trouvions une voie pour notre salut.

 
- Dans ce contexte, que peut faire la diaspora  ?
 - Nous avons constaté que la Diaspora se tient effectivement toujours à nos côtés. Mais le problème est aujourd’hui de savoir comment travaillent avec la Diaspora le prétendu « Haut-commissariat à la Diaspora », s'il existe, les diplomates, l'Église, les diocèses, etc. 
 Aujourd’hui, on ne devrait débattre ni de questions religieuses, ni de politique, ni de positions partisanes, mais seulement et seulement d’un appel à l'unité qui devrait être lancé car il s’agit d’une question de vie ou de mort. Nous vivons un deuxième Sardarabad.
 Nous devons nous lever comme  un seul homme, que ce soit au son des cloches, à l’initiative des intellectuels, de l'Église ou des hommes politiques. Je n’en sais trop rien. Tout ce que je sais, c’est qu’il devrait se trouver des dirigeants qui aient le courage de se manifester et d’arracher notre nation à cette situation mortifère.

 

- Pour résumer, il existerait des voies de salut et seule l’unité serait nécessaire ?
 - Tout à fait ! Tout le monde le sait. Tout le monde sait comment faire. L'ennemi n'est pas un nouvel ennemi. Nous le connaissons bien et nous connaissons également bien son comportement. Nous sommes également informés de ses projets. Il suffirait de descendre dans la rue et d’interroger les gens. Nous verrions alors que tout le monde connait parfaitement notre ennemi.
 Mais, même si nous connaissons cet ennemi - ce qui n’est pas rien -  nous n'avons toujours pas la force de nous unir pour le remettre à sa place.  C'est pour moi la chose la plus étrange. 
 Si encore nous avions affaire à un ennemi inconnu et invisible, je le comprendrais.  Mais dans ce cas précis, nous avons déjà eu l'occasion de le combattre en de multiples lieux. 
 Je veux simplement réaffirmer que toute lenteur, toute hésitation, pourrait avoir des conséquences fatales pour notre nation.
 
Traduction : Sahak Sukiasyan