Cinquième anniversaire de la guerre de 44 jours

Le 27 septembre marquait le cinquième anniversaire de la guerre de 44 jours. En ce jour de 2020, aux premières heures du matin, à 7h10, l’Azerbaïdjan a lancé une attaque sur toute la longueur de la ligne de contact en Artsakh, ainsi que sur certaines sections de la frontière arméno-azerbaïdjanaise.

Dès les premières heures de la guerre, de l’artillerie lourde, des drones et des forces aériennes ont été utilisés. La loi martiale et la mobilisation générale ont été décrétées en Arménie et en Artsakh.

Des combats acharnés se sont déroulés pendant quarante-quatre jours consécutifs. Trois tentatives de cessez-le-feu ont été faites, mais en vain : les accords n’étaient pas respectés et l’armée azerbaïdjanaise poursuivait ses assauts.

L’Azerbaïdjan a pris le contrôle de la quasi-totalité de l’Artsakh, atteignant jusqu’à Chouchi. Ce n’est que dans la nuit du 9 au 10 novembre, grâce à la médiation du président russe, qu’une déclaration tripartite a été signée, mettant fin aux hostilités. Un contingent de maintien de la paix russe a été déployé en Artsakh, lequel, comme on le sait, n’a réussi ni à empêcher le blocus inhumain de près de 10 mois imposé par l’Azerbaïdjan à la population arménienne de l’Artsakh, ni l’exode de la population arménienne autochtone de ces terres arméniennes séculaires.

Selon les données officielles, la partie arménienne a perdu 3 830 vies dans cette guerre, dont 3 752 étaient des soldats et militaires, et 78 des civils. À ce jour, le sort de 195 personnes demeure inconnu.

Ainsi, le 27 septembre est devenu le début de l’une des pages les plus tragiques de l’histoire moderne de l’Arménie.

Visite de représentants de l’Église, de l’opposition parlementaire et des autorités de l’Artsakh à Yerablur

Le 27 septembre, le flux de personnes vers le panthéon militaire de Yerablur n’a pas cessé de toute la journée, venues rendre hommage à la mémoire éternelle des milliers de martyrs.

Des membres du clergé, de l’opposition parlementaire et des représentants des autorités de l’Artsakh se sont également rendus à Yerablur, notamment le primat du diocèse de l’Artsakh, l’évêque Vrtanes Abrahamian, des députés de la faction « Hayastan » dirigés par leur chef Seyran Ohanian, le dernier président de l’Artsakh Samvel Chahramanian, le président de l’Assemblée nationale de l’Artsakh Achot Danielian, le ministre d’État de l’Artsakh Nejteh Iskandarian, des députés de l’Assemblée nationale de l’Artsakh et d’autres. Ils ont déposé des fleurs devant le mémorial « L’Appel de l’Artsakh ».

Il est important de noter qu’aucun représentant des autorités arméniennes ne s’est officiellement rendu à Yerablur le 27 septembre. Il s’agit d’une posture inacceptable et injustifiable envers la mémoire des héros qui ont sacrifié leur vie pour la patrie. Et si cette absence était motivée par le souci d’éviter d’éventuelles complications, il aurait fallu au minimum informer le public par une déclaration des motifs de cette absence, ce qui – à notre connaissance – n’a pas été fait.

On ne peut pas non plus dire qu’il s’agit d’une question d’« interprétation » de la date, car le Premier ministre a publié un message sur sa page Facebook à l’occasion de cet anniversaire. « Gloire aux martyrs et vive la République d’Arménie », a-t-il écrit, en joignant une photo à sa publication. Rien de plus. Et cette publication elle-même est un phénomène digne de discussion, car elle donne l’impression d’accomplir un « devoir » avec un minimum d’effort ou de volonté.

Et si certains pouvaient penser que c’est peut-être la phase actuelle de « rapprochement » avec l’Azerbaïdjan qui dicte cette attitude, notons immédiatement que cette circonstance n’a absolument pas empêché Aliev, le même jour, le 27 septembre, d’honorer la mémoire de leurs shehids (martyrs). Il s’est rendu au mémorial de Gandja construit après la guerre de 44 jours, où il a déposé une gerbe. Le but de ce mémorial est de rappeler les « événements de Gandja » et les « tirs de missiles de l’armée arménienne depuis le territoire arménien ».

Hommage rendu dans la région de Chirak à la mémoire des victimes de la guerre de 44 jours

Le 27 septembre, dans la région de Chirak, un hommage a été rendu à la mémoire des héros qui ont sacrifié leur vie pour la patrie. Sous la direction du gouverneur de Chirak, Davit Aruchanian, les responsables de l’administration régionale, les chefs de communautés, les représentants des forces de l’ordre, les militaires, ainsi que les membres de l’Union des volontaires Yerkrapah se sont rendus au « Panthéon des combattants de la liberté » de Gyumri. Les visiteurs ont déposé des gerbes et des fleurs sur les tombes des combattants immortalisés, ont brûlé de l’encens et ont rendu hommage à leur mémoire.

« Cinq ans se sont écoulés depuis le cauchemar de 44 jours, mais nos souvenirs ne se sont pas estompés. Nos héros se sont battus pour la patrie, pour cette terre et cette eau, pour la pérennité de la République d’Arménie, pour la paix. Pendant des siècles, nous avons payé un prix très élevé pour avoir la paix, pour avoir un pays, pour avoir une République d’Arménie indépendante et souveraine, et chaque fois que nous venons ici, nous devons nous rappeler pourquoi nos garçons ont donné le plus précieux : leur vie et leur sang. Alors comment pourrions-nous hésiter à donner de notre personne pour notre pays ? Nous avons besoin de paix, que nous avons maintenant atteinte, et nous avons tous la volonté de développer notre patrie et de la faire avancer vers l’éternité », a déclaré le gouverneur de Chirak, lors d’un entretien avec des journalistes.

Pour connaître la douleur, il faut s’adresser à ceux dont le cœur saigne

Depuis Yerablur, les yeux humides :

La mère du capitaine Arsen Haroutunian, depuis cinq ans, n’appelle plus son fils, mais a tatoué sur son bras : « Arsen Balas ». « J’entre ici la tête baissée, je sors la tête baissée, parce que nous n’avons pas pu garder nos terres », note-t-elle.

Le fils de Sevak Zakarian n’avait que 18 ans et n’était soldat que depuis 12 jours lorsque la guerre de 44 jours a éclaté. Le père promène son regard sur les milliers de visages souriants sous les drapeaux flottants et se demande : pourquoi ?

La mère de Vrej Avetissian espère la paix, mais pas pour elle. Elle dit que pour elle et ses compagnes d’infortune, la guerre ne finira jamais : « Si nous avons une victime, alors la guerre n’est pas finie, elle ne finit pas pour nous. Je ne sais pas pour qui elle finira, mais pour nous, elle ne finit pas. »

Lusia Haroutunian, originaire de Soumgaït et installée à Bakou après son mariage, puis déplacée de force en Artsakh, et maintenant de nouveau déplacée, n’imagine pas de voisinage pacifique après la perte de son fils unique.

Olia Mkrtchian n’a cure des discours prononcés depuis de hautes tribunes, très loin d’elle. Le martyr Aram est son petit-fils, et son gendre a été enterré à Stepanakert. La grand-mère veut juste une maison, elle pleure comme un enfant.

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Le gouvernement prévoit de présenter prochainement un projet de loi visant à déclarer le 27 janvier, veille de la fête de l’Armée, jour de commémoration de toutes les victimes de toutes les guerres, mais l’opposition rejette cette proposition. L’ancien ministre d’État de l’Artsakh et défenseur des droits de l’homme, Artak Beglarian, s’y oppose également. Il suggère de choisir le 27 septembre, date du début de la catastrophe de 44 jours, ou le 19 septembre, début de la chute de l’Artsakh. « Je conseille à Ruben Rubinian et Guegham Nazarian, ainsi qu’à l’opposition d’ailleurs, de déclarer le 19 septembre ou le 27 septembre jour de commémoration du génocide et de l’apatridie du peuple de l’Artsakh. Si le mot génocide ne leur plaît pas, s’ils le contestent, alors qu’ils parlent de nettoyage ethnique », a-t-il noté.

Qu’il y ait ou non des subtilités et des calculs politiques derrière cette décision, elle demeure finalement une question protocolaire, et il est douteux qu’elle change quoi que ce soit au chagrin des proches des martyrs. Mais, à côté de cela, un minimum est possible : par exemple, la route menant aux tombes de la partie inférieure de Yerablur a besoin d’être asphaltée. Il est encore plus difficile pour ceux qui ont déjà du mal à garder leur équilibre de le faire sur un chemin rocailleux. Une demande à ce sujet a déjà été présentée depuis un certain temps.

Éditorial