Les négociations arméno-azerbaïdjanaises se déroulent sans avancées tangibles. Le représentant officiel du Département d’Etat américain, Matthew Miller, a formulé de façon remarquable le processus de négociation en cours :
« Nous continuons de croire qu’il est possible de parvenir à un accord et attendons avec impatience de nouvelles négociations dans les mois à venir. Le signe du succès des négociations arméno-azerbaïdjanaises est la poursuite des négociations ». Tout a été dit, l’important est de négocier, même si dans la foulée, l’Azerbaïdjan mène son blocus autour de l’Artsakh et sa politique génocidaire et de nettoyage ethnique contre les Arméniens d’Artsakh, même si pendant ces négociations, l’Azerbaïdjan a perpétré des attaques de drones tuant quatre soldats de l’armée de l’Artsakh…
Ainsi, durant cette année, pour la deuxième fois, les ministres des Affaires étrangères d’Arménie et d’Azerbaïdjan, Ararat Mirzoyan et Jeyhun Bayramov fin juin ont tenu des négociations de trois jours à Washington avec la participation du secrétaire d’État Blinken.
Quelques jours après ces négociations, le 6 juillet, la porte-parole du ministère arménien des Affaires étrangères annonçait la deuxième décision de la Cour internationale de La Haye : « La Cour internationale de justice a réaffirmé sa décision, obligeant l’Azerbaïdjan à fournir un accès sans entraves par le corridor de Latchine. L’Azerbaïdjan doit appliquer pleinement la décision de la Cour internationale du 22 février, sans spéculation. »
La porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, Maria Zakharova, elle aussi, a appelé l’Azerbaïdjan à rouvrir le corridor de Berdzor conformément aux dispositions de la déclaration tripartite de novembre 2020. Et si dans le passé, le ministère des Affaires étrangères de l’Azerbaïdjan n’osait pas répondre directement aux déclarations de Moscou, il semble à présent que les choses ont changé. Bayramov a répondu sans détour : «L’État azerbaïdjanais a son propre point de vue pour résoudre les problèmes conformément aux normes et principes du droit international. Nous menons notre politique non pas en fonction des appels de tel ou tel, mais en fonction de nos intérêts nationaux. Nous sommes convaincus que cette politique conduira à des résultats positifs. »
De plus, Bayramov a fait une déclaration tout aussi remarquable qui résume la stratégie de négociation de l’Azerbaïdjan : «Après la guerre patriotique de 44 jours et notre victoire, notre principale priorité est la confirmation de cette victoire sur les plans juridique et diplomatique, son acceptation par la communauté internationale. Des efforts sont en même temps déployés pour résoudre ce problème à la table des négociations. » Il n’a pas oublié de rappeler que les parties mènent des négociations sur l’ouverture des voies de communication, ce qui pour l’Azerbaïdjan signifie l’ouverture du couloir de Syunik reliant l’Azerbaïdjan au Nakhitchevan.
Les États-Unis considèrent les négociations arméno-azerbaïdjanaises dans le contexte de la guerre russo-ukrainienne et de la confrontation Occident-Iran. De ce point de vue, soulignons la visite récente du Secrétaire du Conseil de sécurité de la République d’Arménie, Armen Grigorian aux États-Unis, où il a rencontré le conseiller à la Sécurité nationale Jake Sullivan, pour discuter de la situation sécuritaire régionale et plus largement «extra-régionale» et des défis militaires. La formule « situation sécuritaire extra-régionale et des défis militaires » mérite ici d’être soulignée. Gardant à l’esprit que l’Arménie a du mal à résoudre ses problèmes avec l’Azerbaïdjan et la Turquie, les États-Unis placent les relations avec l’Arménie dans le cadre de sa sécurité nationale, régionale et extra-régionale, c’est-à-dire de nouvelles alliances Ouest-Est. L’Arménie cherchant de nouveaux appuis sécuritaires pour rééquilibrer son alliance défaillante avec la Russie, se trouve devant de nouveaux défis sans avoir la garantie que les États-Unis ou l’Occident viendront à son secours en cas de besoin. Et il en va de même pour la sécurité de l’Artsakh.
J. Tch.