Découverte d’une église des VIe-VIIe siècles dans l’enceinte du monastère de Kecharis

Une découverte inattendue a eu lieu au sein du célèbre complexe monastique de Kecharis, à Tsakhkadzor : une nouvelle église a été mise au jour. Nul n’imaginait qu’un édifice, et qui plus est un lieu de culte, s’élevait à cet endroit il y a plusieurs siècles ; à ce jour, aucune source historique ne mentionnait son existence.

Tout a commencé lors de travaux d’aménagement financés par les familles Vardanian et Mkrtchian. Dans une zone herbeuse apparemment vide, des ouvriers ont fortuitement mis au jour deux pierres tombales. Ce fut le prélude à une découverte archéologique majeure et singulière. Une expédition de l’Institut d’archéologie et d’ethnographie de l’Académie nationale des sciences d’Arménie a rapidement été dépêchée sur place pour des fouilles de vérification. Aux abords de l’église, plus de 100 pierres tombales ont été exhumées, suivies par la révélation d’une magnifique église en tuf. Selon les premières estimations, l’édifice remonterait aux VIe-VIIe siècles, suggérant que les origines du complexe monastique se trouvent ici.

Une architecture unique pour l’époque

Selon Haroutun Badalian, chef de l’expédition archéologique, la structure est exceptionnelle. Si l’Arménie compte quelques églises du haut Moyen Âge à plan quadrilobé (quatre absides) et coupole centrale en forme de croix, celles-ci sont généralement de dimensions modestes.

« Celle-ci se distingue nettement des autres : elle est plus vaste et possède des sacristies (pastophoria) sur les côtés sud et nord, ce qui en fait un cas manifestement unique. Nous avons déjà dégagé des murs de 160 à 170 cm de hauteur, le dallage, les sacristies, les quatre absides ainsi que l’autel principal avec son estrade. Elle disposait de trois entrées, dont deux ont été condamnées par la suite », précise M. Badalian.

Le chef de l’expédition archéologique, Haroutun Badalian

Quant aux causes et à la date de la destruction de l’église, les archéologues en sont réduits aux conjectures. Un tremblement de terre ou le non-respect des normes architecturales de l’époque pourraient être en cause, mais l’effondrement semble avoir été précoce. Selon M. Badalian, des interventions ont eu lieu aux XIIe et XIIIe siècles autour et à l’intérieur de l’édifice, notamment l’ajout de bâtiments à vocation économique. Actuellement, un épigraphiste travaille sur place pour déchiffrer les inscriptions conservées sur les pierres tombales et les pierres de l’église.

Une réécriture de l’histoire du site

Tigran Aleksanian, archéologue membre de l’expédition, n’exclut pas que le cimetière médiéval ait été plus étendu, se prolongeant sous l’actuelle route. L’église Saint-Haroutun, située sur la colline de l’autre côté de la voie, fait également partie de l’ensemble de Kecharis. En d’autres termes, toute cette zone constitue un complexe unique, aujourd’hui scindé par la construction de la route.

Tigran Aleksanian, archéologue membre de l’expédition

« Cela bouleverse notre compréhension du complexe monastique de Kecharis. Selon les sources, le monastère a été fondé au XIe siècle, mais il s’avère qu’il a été bâti sur l’emplacement d’un sanctuaire préexistant bien plus ancien. Cette église nouvellement découverte est, à ce jour, la structure ecclésiastique la plus ancienne documentée sur l’ensemble du site », souligne-t-il.

Selon M. Aleksanian, un grand nombre de céramiques, d’objets métalliques et d’autres artefacts ont été découverts sur le site et transférés en laboratoire pour étude et restauration.

« Tout cela était inattendu. Les historiens ne fournissaient aucune information à ce sujet. Les recherches vont se poursuivre, et les archives devront également être examinées », indiquent les archéologues.

Les habitants de la région sont eux-mêmes stupéfaits. Presque chaque jour, ils viennent par groupes, admiratifs et incrédules, se demandant comment ils ont pu vivre toute une vie à cet endroit sans soupçonner les secrets enfouis sous les prairies.

Les fouilles, entamées en septembre, touchent à leur fin pour cette année. L’église nouvellement découverte sera placée sous un abri temporaire pour la protéger des intempéries et d’éventuels effondrements. Les travaux reprendront l’année prochaine, promettant sans aucun doute de nouvelles révélations inattendues.

Éditorial