Espionnage et collaboration : le Mossad était-il présent au Haut-Karabakh ?

Par Vahram ATANESSIAN

 1in.am, Erevan le 16 juin 2025

Dans un article analytique, le média américain Wall Street Journal tente de répondre à la question de savoir comment Israël a pu établir un contrôle total sur une partie importante de l’espace aérien iranien dès les premiers jours de l’opération « Lion levant », alors que la Russie n’a pas réussi à atteindre le même objectif contre l’Ukraine en trois ans et demi de guerre.

Le site web israélien Vesty.go.il a publié de larges extraits de cet important article. Celui-ci mériterait une étude approfondie et exhaustive, mais à ce stade, il convient peut-être de prêter attention à l’analyse de l’analyste israélien Michael Gorovets qui affirme «qu’en substance, ce qu’Israël a fait en Iran ressemble à ce que la Russie voulait faire en Ukraine. » Selon cet analyste israélien, la Russie pensait pouvoir mener une opération secrète pour infiltrer et décapiter l’administration ukrainienne, mais il s’est avéré qu’il n’était pas si facile de pénétrer de larges secteurs de la société ukrainienne. Il estime qu’en Iran, « le régime est tellement inacceptable qu’il a été facile de trouver des personnes prêtes à coopérer avec Israël ». Cela peut être un peu exagéré, mais on peut  aussi éventuellement se souvenir  de la réunion convoquée par le président russe Vladimir Poutine à la veille de l’attaque contre l’Ukraine ; réunion au cours de laquelle le directeur du service de renseignement extérieur, Sergueï Narychkine, n’avait pas pu répondre clairement à la question « était-il pour ou contre une opération militaire spéciale ? ». La réalité est que depuis le début de la guerre, les services spéciaux russes n’ont pas réussi à organiser d’opérations significatives et de grande envergure, ni de manifestations de masse de la part de la population russe et russophone d’Ukraine. Il est certes difficile d’affirmer avec certitude que la majorité de la société iranienne est hostile à la théocratie, mais il semble évident qu’Israël dispose d’un réseau d’agents influents dans ce pays. Qui plus est, une publication sur les réseaux sociaux de Hikmet Hadjiev, conseiller du président azerbaïdjanais pour la politique étrangère, par laquelle il réfute l’envoi d’espions israéliens d’Azerbaïdjan vers l’Iran, et qui doit être interprétée dans un sens diamétralement opposé, indique que l’Iran a sous-estimé pendant des années le danger de la coopération stratégique israélo-azerbaïdjanaise. Ce n’est pas un hasard si Israël a lancé son attaque contre l’Iran deux semaines seulement après l’opération spéciale « Toile d’araignée » dirigée contre les aérodromes militaires russes. La Russie avait affirmé que ce « sabotage » avait été organisé par les services spéciaux britanniques. Dans le cas de l’Iran, rien ne révèle clairement l’intervention d’une tierce partie. Le ministre des Affaires étrangères Araghchi et d’autres responsables se contentent d’affirmer qu’Israël a attaqué au vu et au su des États-Unis. Mais des sources israéliennes ont révélé que le Mossad transportait depuis longtemps des drones, des munitions et des plateformes de lancement vers le territoire iranien. L’Ukraine présente la préparation de l’opération « toile d’araignée » de la même manière. Dans les deux cas, la Russie comme les pays limitrophes de l’Iran sont soupçonnés.

Plus important encore sans doute, dans la guerre contre le Haut-Karabakh, l’Azerbaïdjan a-t-il  utilisé le même scénario qu’Israël lors de son attaque contre l’Iran ?

Durant la Guerre des Quarante-quatre jours, l’Azerbaïdjan avait également ciblé des militaires arméniens de haut rang et des responsables du Service de sécurité nationale de l’Artsakh.

La question est donc de savoir si ces actions avaient été préparées longtemps en amont.

Et si oui, l’Azerbaïdjan avait-il mené une campagne d’espionnage organisée au Haut-Karabakh ? Et quelles mesures avaient été prises durant les cinq dernières années pour s’en assurer ?