Le Premier ministre Pachinian tente de convaincre Moscou et Téhéran que le désenclavement arméno-azerbaïdjanais leur sera également profitable, tandis que des hauts responsables russes et iraniens discutent entre eux des derniers développements régionaux et évoquent la nécessité de protéger leurs intérêts communs.
Téhéran a déjà exprimé ouvertement ses préoccupations concernant l’implication américaine potentielle dans le projet régional « Route de Trump – TRIPP », tandis que Moscou, qui mène des négociations directes avec Washington, ne l’évoque qu’entre les lignes de ses déclarations.
« Lorsque les projets seront mis en œuvre, par exemple, l’Iran pourra avoir la possibilité de relier par voie ferrée le Golfe Persique à la mer Noire, tandis que la Russie et l’Iran pourront établir une connexion ferroviaire entre eux. Si nous nous concentrons sur l’aspect économique de l’accord, non seulement l’Arménie, l’Azerbaïdjan, les États-Unis et la Turquie, mais aussi la Russie et l’Iran retireront des avantages très importants », a déclaré le Premier ministre arménien dans une interview accordée à Fox News.
Ainsi, Fox News a mis en évidence la partie concernant l’Iran et la Russie de l’interview de Pachinian, que le dirigeant arménien avait accordée le 9 août, le lendemain de la signature de la déclaration avec les dirigeants des États-Unis et de l’Azerbaïdjan.
Selon la déclaration, l’Azerbaïdjan sera relié au Nakhitchevan sans obstacle par une route traversant le territoire arménien, tandis que l’Arménie obtiendra des avantages réciproques en matière de communications internationales et intérieures.
Pour mettre en œuvre le projet appelé « Route de Trump », les États-Unis devront travailler avec l’Arménie. Mais sous quelle forme ? Ce n’est pas encore clair. Il est connu qu’Erevan et Washington ont également signé un mémorandum visant à développer les capacités du projet « Carrefour de la paix » proposé par le gouvernement arménien, dont les détails restent également inconnus pour l’instant.
D’autre part, aucune déclaration n’a été faite concernant d’éventuelles négociations avec la partie russe après Washington. Officiellement, il a seulement été annoncé que Pachinian et Poutine, ainsi que les ministres des Affaires étrangères des deux pays, ont eu une conversation téléphonique. Quant à Téhéran, Erevan y a même envoyé un négociateur. En effet, le vice-ministre des Affaires étrangères Vahan Kostanian a eu des rencontres en Iran tant avec l’aile civile du leadership iranien qu’avec les représentants de l’aile spirituelle, cette dernière manifestant une opposition plus ferme aux perspectives de présence américaine.
Il ressort clairement du communiqué officiel que Kostanian tente d’apaiser les préoccupations de l’Iran, qui considère l’intégrité territoriale de ses voisins comme une « ligne rouge ». En effet, selon le ministère des Affaires étrangères d’Arménie, Kostanian a déclaré à Téhéran qu’Erevan prend également en compte les intérêts vitaux de l’Iran dans ses démarches.
Dans une interview accordée à l’agence iranienne IRNA, Kostanian a donné quelques détails sur la « Route de Trump », déclarant : « Il est prévu que cette entreprise (qui se chargera de la mise en œuvre de la ‘Route de Trump’ – NDLR) soit enregistrée en Arménie, et les actions seront partagées entre l’Arménie et les États-Unis. Mais cela ne signifierait pas une présence militaro-politique américaine dans la région. Nous comprenons que c’est l’une des principales préoccupations de la partie iranienne et, à mon avis, cette question est résolue. »
L’Iran s’inquiète de la perte de liens avec l’Arménie dans les conditions d’une présence américaine. Kostanian a assuré que l’Arménie considère la frontière avec l’Iran comme très importante et apprécie hautement le soutien de Téhéran à l’Arménie ces dernières années.
« Cette position est aussi importante pour nous qu’elle l’est pour l’Iran, et cela ne changera en aucune circonstance. Nous avons donné les garanties appropriées à la partie iranienne », a déclaré dans l’interview le vice-ministre des Affaires étrangères, qui, selon Erevan, a souligné à Téhéran que selon la déclaration tripartite, le désenclavement de la région aura lieu en respectant pleinement les principes d’intégrité territoriale, de souveraineté, de juridiction et de réciprocité des pays.
Ali Akbar Velayati, conseiller du leader spirituel iranien pour les affaires internationales, qui voit une menace d’instabilité dans la présence de pays extra-régionaux, avait déclaré que toute action menaçant la sécurité nationale de son pays recevrait une réponse. Selon des sources iraniennes, lors de sa rencontre avec Kostanian, Il a souligné l’importance de la paix arméno-azerbaïdjanaise et a répété que l’Iran ne peut tolérer aucune mesure contre sa sécurité.
Selon des journalistes étrangers, l’administration Trump considère que la nouvelle route constitue un défi à l’influence de Moscou et de Téhéran dans la région en assurant une connexion directe du Caucase du Sud vers l’Europe, contournant la Russie et l’Iran. Dans ce contexte, des responsables iraniens et russes de haut niveau ont entamé des discussions.
Le représentant spécial du ministre des Affaires étrangères de Russie pour les questions de règlement arméno-azerbaïdjanais, Igor Khovaev, a eu la semaine dernière une rencontre à Téhéran avec le ministre des Affaires étrangères Abbas Araghchi. Le ministre a souligné l’importance de régler les questions du Caucase par les forces des pays de la région, notamment dans le format 3+3. Notons que le format 3+3 comprend l’Arménie, la Géorgie, l’Azerbaïdjan, la Russie, l’Iran et la Turquie.
Tant les médias d’État russes qu’iraniens rapportent que le ministre Araghchi a souligné lors de sa conversation avec le responsable russe l’importance de l’unité entre Moscou et Téhéran dans les questions régionales.
Les médias d’État iraniens, faisant écho à la déclaration d’Araghchi, rapportent qu’il est nécessaire de renforcer la coopération bilatérale russo-iranienne pour protéger les intérêts communs.
Après la déclaration de Washington, Moscou rappelle périodiquement, pour sa part, les accords arméno-azerbaïdjanais de désenclavement obtenus par sa médiation, notant que si ces accords n’ont pas été mis en œuvre, c’est qu’Erevan et Bakou en sont seuls responsables. Moscou affirme simultanément et constamment que lors de l’élaboration des décisions de désenclavement, Erevan ne doit soudainement pas oublier qu’elle est membre de l’Union économique eurasiatique (UEE).
Source : « Azatutyun »
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