Désigner Mourad Papazian comme persona non grata à la frontière arménienne et lui refuser l’entrée en Arménie est un acte condamnable.
Ce n’est pas la première fois qu’un homme politique franco-arménien se voit refuser l’entrée en Arménie. A l’époque de Serge Sarkissian, le 21 mai 2015, le coordinateur de la branche parisienne de l’organisation diasporique « Renaissance arménienne », Shant Voskeritchian, avait également connu le même sort. A cette époque, le CCAF avait condamné cette mesure, mais la FRA n’avait pas manifesté sa désapprobation, peut-être en raison de son alliance avec le parti Républicain.
Qui que soit la personne en question et quelles que soient les conditions présentes, cette mesure est inacceptable, tout comme la lutte contre les hommes d’État et les ambassadeurs arméniens menée par la FRA et par d’autres forces politiques de diaspora à l’étranger.
Jusqu’à présent, aucune déclaration ou explication officielle n’a été donnée par le Service de sécurité nationale d’Arménie (NSS). Et il ne faut pas s’attendre à ce qu’elle soit fournie. A en juger par le précédent de Shant Voskeritchian, le Service de sécurité nationale avait précisé qu’il n’a aucune obligation de fournir d’explication. La sécurité de l’État exige d’agir dans le plus grand secret. C’est la position qu’avait adoptée l’avocat du Service de sécurité nationale lors de l’audience initiée par l’avocat de Shant Voskeritchian, Arthur Sakounts. Lors de l’audience, il avait déclaré : « Les résultats des recherches opérationnelles, qui se réfèrent ici à l’interdiction d’entrée de J. Ozkirisian (Shant Voskeritchian) ne peuvent pas être fournies. Telle est la position du NSS. »
Mourad Papazian est un homme politique franco-arménien connu. En tant que membre du bureau de la FRA, il a récemment participé à la lutte politique, aux manifestations de rue de l’opposition parlementaire arménienne pour le renversement du gouvernement Pachinian. Si d’un point de vue nationalistique arménien, motivé par des sentiments patriotiques, cette décision des autorités arméniennes est perçue comme inacceptable, n’oublions pas que cette mise en scène doit être vue à travers le prisme de la lutte politique pour le pouvoir. La FRA, en tant que membre de l’opposition parlementaire de l’alliance « Hayastan », a mené une lutte implacable contre le gouvernement arménien. Il est naturel que le gouvernement riposte, utilise toutes les armes légales dont il dispose pour lutter contre les forces qui veulent le renverser et qui n’hésitent pas à rallier à la lutte ses compagnons d’armes de la diaspora au premier rang desquels se trouve Mourad Papazian, en tant que le Président de du Comité central de la FRA pour l’Europe occidentale.
Prendre pour cible Mourad Papazian a aussi pour but de remettre en cause l’attitude hostile du Comité central de l’Europe occidentale lors de la visite d’hommes d’État arméniens en France, dont l’exemple le plus frappant a été la position inhospitalière de la FRA lors de la première visite en France de Zareh Sinanian, Haut-Commissaire aux affaires de la Diaspora. C’est de la lutte politique, une lutte acharnée pour s’emparer du pouvoir, pour s’y maintenir, dans laquelle il ne faut pas chercher de nobles idées patriotiques ou nationales.
Il serait souhaitable que les forces politiques de l’Arménie et de la Diaspora fassent preuve d’une plus haute culture en matière de lutte politique et de compréhension mutuelle, en particulier au vu des défis existentiels auxquels sont confrontées l’Arménie, la diaspora, l’Artsakh et les Arméniens du monde entier. Pourtant ce sont la division et la confrontation qui dominent au lieu de s’unir pour former un front soudé, de mener une lutte contre l’ennemi qui – sans aucune pitié et en violation du droit international – continue de garder en otage des prisonniers de guerre de la guerre des 44 jours, de détruire des monuments historiques et culturels, d’alimenter les tensions à la frontière, d’appliquer sa politique anti-arménienne, de porter atteinte à la sécurité de l’Arménie et de menacer sa souveraineté… Mais nous avons ce que nous méritons, et rien de plus. Comment sortir de cette situation ?
À l’heure actuelle, il n’y a aucun signe d’amélioration à l’horizon.
J. Tch.