Pachinian poursuit son «offensive»

Le 31 mai au matin, Nikol Pachinian a poursuivi son « offensive » contre l’Église apostolique arménienne[1] entamée la veille avec un grand entrain.

Il est plus qu’évident qu’il ne s’agissait pas d’une initiative spontanée, mais d’une véritable action planifiée s’inscrivant dans une logique préélectorale et politique plus large.

 Mais derrière tout cela, se trouve sans doute la question la plus importante, celle essentielle  des relations entre l’Église, la société et l’État. Une question qui s’est posé en Arménie bien avant Nikol Pachinian et qui, bien évidemment, ne sera pas résolue par Nikol Pachinian.  Il ne fait aucun doute que la logique qui préside à l’acte de Pachinian constitue un message adressé à la société arménienne. En l’occurrence,  la question de la subordination de l’Église apostolique arménienne, une institution qui a une importance capitale dans la vie du peuple arménien, à la politique des autorités politiques actuelles.

Pour y parvenir, Pachinian utilise très ouvertement les problèmes de fond et les opinions de tout type préexistant dans les différentes couches de la société apparus au fil des années, voire des décennies. Le tout étant le résultat des perturbations du système de relations entre l’Église, la société et l’État et les décalages engendrés par le temps.

Si de nouvelles approches ne sont pas développées en la matière, si un travail systématique et stratégique n’est pas réalisé, malgré sa grande importance, l’Église demeurera une cible politique  sans cesse soumise au «credo » politique du gouvernement en place. Les attaques pourront revêtir différentes formes, depuis la manière douce jusqu’à la manière forte, mais elles seront toujours présentes tant qu’il y aura un terrain foncièrement favorable à cela. Le premier bénéficiaire de la résolution de ce problème devrait être l’Église elle-même, son « partenaire numéro un »  la société, le citoyen ordinaire, les chrétiens.

Dans tous les cas, il sera impossible de résoudre ce problème par une confrontation, même la plus acérée, avec les autorités gouvernementales, car à l’issue de cette confrontation, même si le perdant est le gouvernement concerné, ce n’est pas l’Église qui sortira vainqueur de l’épreuve, mais le nouveau gouvernement qui succèdera au précédent. Dans le même temps, le problème fondamental et le terreau qui favorise la permanence de ce problème ne pourront pas être neutralisés par un accord de principe « d’inclusion » à un gouvernement[2], car dans ce cas, le gagnant sera ce gouvernement, et non l’Église.  Après avoir adopté jusqu’en 2018 cette deuxième voie qui se révéla inefficace, l’Église apostolique arménienne a ensuite, surtout au cours des cinq dernières années,  opté pour la première voie, celle de l’affrontement, tout aussi inefficace. L’Église apostolique arménienne a donc besoin d’une « troisième voie », d’un travail en profondeur avec la société, qui prenne en compte la mondialisation, les transformations technologiques et surtout sociales, psychologique et idéologiques. C’est ainsi que l’Église y gagnera ; qu’elle pourra trouver des réponses à cette question essentielle et parer à toutes les attaques du monde politique.

———

[1] Il serait sans doute  plus objectif de parler d’offensive contre une partie de la hiérarchie de l’Église, plutôt que « contre l’Église »

[2] Une situation dans laquelle l’Église et l’État seraient étroitement liés comme durant les années Kotcharian-Sarkissian.