PALAISEAU – Le voyage de Komitas – Le retour de la lumière sur scène

Le 19 octobre, sur la scène du Théâtre La Passerelle à Palaiseau, le spectacle a transporté le public dans un véritable voyage spirituel. Intitulé Le Voyage de Komitas, dédié au 90ᵉ anniversaire de la mort du grand maître, le spectacle a été présenté sous la direction artistique d’Artavazd Sargsyan, en collaboration avec l’association Musicando et avec le soutien de la Ville de Palaiseau.

Cette soirée est devenue un lieu de rencontre entre l’art, la mémoire et l’espérance.

Ce n’était pas un simple concert : c’était une œuvre totale, un dialogue entre la musique, la danse, la peinture et le théâtre, formant un univers unique où chaque couleur, chaque mouvement et chaque son naissaient d’une même inspiration.

Le public comprit très vite qu’il ne s’agissait pas d’un spectacle ordinaire, mais d’une véritable interaction vivante entre la scène et la salle.

Alors que résonnaient les premières notes, un homme, sorti des rangs du public, interrompit soudain le début de la représentation. À l’invitation du metteur en scène, il s’avança lentement vers la scène, comme s’il traversait les frontières du temps et de la mémoire.

C’était Komitas, revenu des profondeurs de son propre passé.

L’acteur Paul-Alexandre Dubois a incarné avec une maîtrise remarquable le grand Vardapet, lui insufflant cette même sérénité intérieure et cette lumière spirituelle qui habitent encore la mémoire collective du peuple arménien. Sa parole et son regard se transformaient en un témoignage vivant – à la fois méditatif et lumineux.

Peu à peu, la scène et la salle ne faisaient plus qu’un.

Komitas s’adressa au public en demandant, d’un ton complice, s’il ne se trouvait pas parmi eux un artiste – peut-être un danseur, une danseuse, ou un peintre. À son appel répondirent la danseuse Anaïs Kedikian et la peintre Aghavni Goletsyan, qui montèrent sur scène pour prolonger la vision de Komitas : celle d’une beauté partagée entre tous les arts.

À partir de cet instant, la représentation devint une action vivante, un souffle unique où chaque art nourrissait l’autre.

Les gestes gracieux de la danseuse et la toile peinte en direct par Aghavni Goletsyan, inspirée par les vibrations de la musique, créaient un merveilleux flux de couleurs et de sons.

Les teintes jaunes et bleues du tableau évoquaient la lumière de Komitas – une lumière qui continue de rayonner à travers les âges.

La partie musicale rendait hommage aux « années françaises » de Komitas, empreintes de l’esprit de Debussy, Fauré, Ravel et Saint-Saëns.

Dans cette texture sonore subtile se distingua le violoniste Davit Hakobyan, dont le jeu délicat et noble formait un pont entre la douleur du passé et la renaissance du présent.

Ancien soldat de la guerre de 44 jours, Davit, ayant traversé les épreuves les plus dures de la vie, a trouvé la force de revenir à la musique. Son interprétation symbolisait non seulement l’expression artistique, mais aussi une histoire de résilience et de victoire spirituelle.

La voix du ténor Artavazd Sargsyan, pure, profonde et émouvante, unissait les mélodies arméniennes et françaises, rappelant la proximité spirituelle et culturelle entre les deux peuples.

Son interprétation du Bleuet créa dans la salle un silence rare – ce silence sacré qui naît uniquement devant la véritable beauté, lorsque les mots se taisent et que seules les émotions parlent.

À la fin de la soirée, la toile achevée d’Aghavni Goletsyan révéla une forêt illuminée, traversée d’une trouée de lumière.
Cette image devint le symbole du spectacle tout entier : la douleur transformée en lumière, et l’art comme guérison de la mémoire.

Le Voyage de Komitas à Palaiseau fut non seulement un hommage au grand compositeur, mais aussi un symbole vivant de l’amitié franco-arménienne — une histoire racontée à travers le langage universel de l’art, où le passé et le présent se rejoignent dans l’espérance et la beauté.

Photos et texte : Artur ARZOYAN
(Association Culturelle « UFRARM »)

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