Le conflit Arméno-azéri va-t-il se transformer en une guerre Irano-azérie

Dans une interview accordée au Figaro, l’ancien secrétaire général de l’OTAN, Anders Fogh Rasmussen, a déclaré voir un danger de guerre entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan dans les mois à venir. Les autorités arméniennes avertissent également constamment que l’Azerbaïdjan se prépare à une attaque à grande échelle contre l’Arménie et l’Artsakh. Parallèlement, le Premier ministre arménien parle également de la volonté de l’Arménie de conclure un accord de paix. Pour beaucoup, il est incompréhensible de pouvoir d’une part d’avertir la communauté internationale du danger d’une attaque et d’autre part de préparer un traité de paix. Dans ce contexte, la déclaration de Babken Tounian, membre de « Contrat civil » est significatif : « Nous ne parlons pas de l’agenda de paix avec l’Azerbaïdjan, mais avec le monde, afin que l’on comprenne que nous ne sommes pas des agresseurs. Nous ne voulons pas la guerre, nous sommes enclins au dialogue constructif et à la paix. Parler de paix ne signifie pas que nous devons attendre les bras croisés et ne rien faire en ce qui concerne l’armée et le renforcement des frontières. » Voici donc la position du gouvernement arménien : aspirer à la paix tout en se préparant à la guerre.

Afin de comprendre la complexité de la situation dans le Caucase du Sud, il est important d’étudier de près les intérêts stratégiques et les politiques des Etats-Unis dans la région. Dans ce contexte, on notera la réponse du secrétaire d’État des Etats-Unis, Anthony Blinken, le 22 mars à la demande de Bob Menendez, membre de la commission des relations étrangères du Sénat américain, selon laquelle, conformément à l’article 907 du « Freedom Support Act », les 164 millions de dollars d’aide militaire à l’Azerbaïdjan devraient être suspendus jusqu’à ce que celui-ci puisse confirmer qu’il résoudra son différend avec l’Arménie exclusivement par des moyens diplomatiques. Blinken a répondu que l’Azerbaïdjan avait « une longue frontière avec l’Iran, qui nécessite d’être défendue ». Il a également souligné la nécessité d’une « coopération entre les forces azéries, américaines et de l’OTAN, car les Azéris participent au maintien de la paix ». Derrière cette déclaration, on ne peut que deviner qu’il s’agit là de la question du maintien de la sécurité d’Israël.

Étant frontalier de l’Iran, l’Azerbaïdjan est d’une grande importance géopolitique pour la politique étrangère américaine, mais aussi en tant que que force contre la présence russe dans la région.

L’Azerbaïdjan est également un partenaire stratégique pour l’Union européenne, de par sa production de gaz et de pétrole.

Dans ces conditions, on ne sera pas surpris par l’audace et les démarches agressives du président azerbaïdjanais Aliev, que l’Arménie n’a pas vraiment les moyens de contrer. Cependant, les préparatifs et les exercices militaires de l’Iran, ainsi que les avertissements de ses dirigeants politiques, sont importantes.

L’appellation par l’Azerbaïdjan de la région nord de l’Iran comme « Azerbaïdjan du Sud » est également un indicateur important de son hostilité envers l’Iran, tout comme il utilise les termes « Azerbaïdjan occidental » et « Zangezour occidental » pour l’Arménie, et « Karabakh » pour l’Artsakh, rejetant l’appellation « Nagorno-Karabakh » utilisée au niveau international. 

La position de la Russie est, quant à elle, bien plus ambiguë, de par ses intérêts stratégiques avec l’Azerbaïdjan et la Turquie. Et la position plus en plus exigeante des dirigeants arméniens envers elle, en tant qu’allié stratégique, et les coopérations multipolaires avec l’Occident, ont mis cette dernière dans une situation inconfortable.

Le média « Hraparak », proche des sources russes, a diffusé une nouvelle qui sonne comme un aveu de faiblesse des casques bleus russes, selon laquelle le président de l’Artsakh, Araïk Haroutunian, après s’être rendu à Moscou, à déclaré à ses proches collaborateurs qu’il fallait se préparer à une longue et dure résistance, répondre à un tir par un tir, et à armer grands et petits pour se préparer à la guerre à venir. Des paroles qui ont rapidement été mises en application, le matin du 28 mars, en prévenant la progression des positions azéries en Artsakh.

J. Tch.