À l’occasion du 850e anniversaire de la mort du patriarche arménien Saint Nersès Chnorhali

Karékine II,

par la miséricorde de Dieu et la volonté de la nation,

Patriarche suprême et Catholicos de tous les Arméniens,

 

Au catholicossat de la Grande Maison de Cilicie,

aux Patriarcats arméniens de Jérusalem et de Constantinople,

aux archevêques, évêques, archimandrites, aux prêtres et aux diacres,

aux assemblées et aux conseils diocésains, 

aux conseils paroissiaux, à tous les serviteurs de l’Église,

et à l’ensemble de nos bienaimés fidèles.

 

 « Tel une sentinelle, il nous invite depuis sa tour de guet à entendre les commandements de Dieu :  Enfants de la Lumière, réveillez-vous dans la bénédiction du Père de la Lumière »[1].

 

C’est avec un profond sentiment de reconnaissance que nous commémorons cette année le 850e  anniversaire de la mort du patriarche arménien Saint Nersès Chnorhali, « celui qui est égal aux Saints Apôtres ».

Le Saint Patriarche Nersès Chnorhali est l’un des plus grands et des plus célèbres catholicos arméniens, un éminent théologien, un grand prédicateur, poète et écrivain, compositeur, historien et pédagogue. Le Patriarche Nersès IV, tel le courageux pasteur qui « donne sa vie pour ses brebis » (Jean 10:11), est devenu un chef vertueux, un phare lumineux pour notre peuple et un ouvrier infatigable au service du Seigneur. Son riche enseignement s’est répandu depuis le Siège patriarcal alors établi à Hromkla[2].

Dans les conditions qui étaient celles de l’exil du siège catholicossal[3], le bienheureux pasteur s’est employé à maintenir intacte la vie spirituelle et nationale de son troupeau, le regard en permanence tourné vers la patrie. Il a sans cesse insisté sur l’importance et la signification particulières de Saint Etchmiadzine en tant que centre spirituel du monde arménien fondé sur le Christ : « Églises d’Arménie dont est née la lumière céleste  … cette lumière a cru au-delà de toute mesure et son rayonnement demeure un grand mystère »[4].

La vie et l’œuvre entière de Saint Nersès Chnorhali ont été une glorification de Dieu et une mission permanente pour ouvrir le cœur de ses contemporains au Seigneur. Il enseigna inlassablement les commandements du Seigneur aux croyants « invitant tel une sentinelle depuis sa tour de guet à entendre les commandements de Dieu : Enfants de la Lumière, réveillez-vous dans la bénédiction du Père de la Lumière (Bréviaire) ».

En des temps difficiles et dévastateurs marqués par d’ineffables douleurs et peines de toutes sortes, le grand patriarche a été le « gardien du troupeau » pour les très nombreux enfants de notre peuple exilés et condamnés à l’errance, adressant à chacun ses conseils paternels et édifiants, aux princes, aux soldats, aux bâtisseurs, aux évêques et aux prêtres, aux diacres et aux clercs, les fortifiant par la foi et en nourrissant l’intellect de chacun d’entre eux[5].

L’autorité de Saint Nersès Chnorhali, ses œuvres les plus importantes, ses hymnes et ses odes d’un style et d’un goût uniques, avaient pour objectif de préserver l’identité nationale et chrétienne des Arméniens, de renforcer et de développer leur vie spirituelle et culturelle. Les fruits de la plume féconde du bienheureux Patriarche ont embelli les rituels de notre Église, préservés l’âme et l’esprit chrétien de notre peuple qu’il a guidé en illuminant son chemin ardu pour le conduire vers de nouveaux horizons spirituels et nationaux.

Saint Nersès Chnorhali jouissait d’une grande renommée auprès de toutes les nations ainsi que de la reconnaissance de toutes les Eglises. Les religieux et les fidèles du monde chrétien de l’époques : les Grecs, les Syriaques et les Latins, étaient impressionnés et inspirés par sa  vertu et sa grande science. S’appuyant constamment sur la miséricorde de Dieu, il a déployé d’énormes efforts au service d’une coopération fraternelle entre les Églises. En œuvrant activement pour effacer la division séculaire entre les Églises chrétiennes dans un esprit évangélique, le bienheureux patriarche d’Arménie est devenu un défenseur de l’unité du monde chrétien, définissant la position de l’Église arménienne selon la formule « l’Unité dans les choses essentielles, la liberté dans les choses secondaires, la charité en toutes choses. »[6]

 

Bien-aimés fidèles, 

les magnifiques exemples de la vie et des actes des grandes figures de la nation arménienne constituent de beaux exemples pour les générations à venir. En se souvenant des personnalités arméniennes talentueuses et célèbres comme le Saint Patriarche Nersès Chnorali, grâce à leur parole réconfortante, à leurs encouragements, notre peuple a gagné en force pour affronter les épreuves, pour vivre et pour progresser dans la voie de la construction d’un avenir heureux. 

De nos jours encore, par son brillant exemple, nous adressant « du haut de sa tour de guet » les commandements du Seigneur, le bienheureux Patriarche inspire les croyants conformément aux recommandations de l’apôtre « te montrant toi-même à tous égards un modèle de bonnes œuvres, et donnant un enseignement pur, digne,  une parole saine, irréprochable, afin que l’adversaire soit confus, n’ayant aucun mal à dire de nous (Tit. 2.7-8).

Par notre encyclique patriarcale, nous invitons les instances diocésaines et communautaires de notre Sainte Église Apostolique, les institutions scientifiques et éducatives, les organisations caritatives et patriotiques, et tout notre peuple, à faire mémoire de Saint Nersès Chnorhali en organisant des conférences, des publications et des commémorations pour mettre en valeur son héritage toujours actuel dans la tradition nationale et de toute l’Eglise, pour honorer le héros de notre spiritualité  et le réformateur de notre vie spirituelle et nationale.

Nous prions devant le « Saint autel de la Descente du Seigneur »[7] afin que dans sa bienveillance, le Seigneur, par l’intercession du Saint Patriarche arménien, sous les protection de sa dextre, protège et fortifie notre peuple tout entier par la foi, l’espérance et la charité, afin d’affronter les difficultés qui marquent nos vies et pour réaliser les idéaux nationaux d’un avenir heureux. 

Que le Seigneur accorde la paix et la prospérité à notre patrie et garde notre Sainte Église apostolique arménienne inébranlable et resplendissante, aujourd’hui et toujours. Amen.

 

Avec mes bénédictions,

Karékine II

Catholicos de tous les Arméniens

 

 

Le 3 Mars de l’An 2023 du Seigneur,

En notre monastère patriarcal de Saint Etchmiadzine

 

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[1] Hymne composé par Saint Nersès intégré dans l’Office de la Nuit du Livre des Heures [ Jamakirk / Bréviaire ].

[2] Forteresse du Royaume arménien de Cilicie située sur l’Euphrate, siège de l’Église arménienne à l’époque de Saint Nersès. La cité-forteresse tombe aux mains des Mameluks d’Égypte en 1292. Le site se trouve actuellement en Turquie, à 50 km de la ville de Gaziantep.

[3] Le siège du Catholicos n’est plus à cette époque à Etchmiadzine, en Grande Arménie, mais dans le Royaume arménien de Cilicie. Les Catholicos résident à Hromkla de 1149 à 1292. 

[4] Lamentation sur la prise d’Edesse.

[5] Sa grande encyclique « La lettre générale » [Tought enthanragan] date de 1166, c’est le grand texte « inaugural » du patriarcat de Nersès. 

[6] Saint Nersès est considéré comme l’un des précurseurs de l’Œcuménisme en raison du dialogue qu’il a mené durant toute sa vie pour restaurer la Communion entre l’Église arménienne et l’Église byzantine.

[7] Autel situé au centre de la Cathédrale de Saint Etchmiadzine et qui marque le lieu de la « Vision de Saint Grégoire ».

 

Traduction : Sahag SUIKIASYAN