« Nor Haratch » – Vous présidez la Fondation de l’enseignement bilingue franco-arménien (EBFA). La Fondation existe depuis six ans, jusqu’aujourd’hui, elle a distribué près de 400 000 € aux écoles arméniennes. Comment sont allouées les sommes et quels sont les critères de choix ?
Raffi Agopyan – Alors tout abord, je précise qu’en réalité notre fondation a distribué plus d’un demi million d’euros, 538.000 euros précisément. Les sommes sont allouées quasi exclusivement aux écoles quotidiennes de France. Nous avons aussi participé, seuls ou avec d’autres comme la Fondation Gulbenkian, à plusieurs programmes pour des films d’animation de « Parev Arev » qui sont diffusés dans les écoles et les familles du monde entier. À titre exceptionnel, nous avons également aidé des écoles hebdomadaires, entre-autres lors du lancement d’une nouvelle école ou classe. Nos décisions sont prises de façon collégiale, au sein d’un comité qui réunit à la fois les 2 fondateurs, ma mère Isabelle Agopyan et moi-même, deux personnalités reconnues du monde arménien et de l’enseignement ainsi que deux représentants des donateurs. Nous étudions les projets au regard de nos fonds disponibles, du nombre d’élèves, des projets d’investissement en cours mais également nous tenons compte des souhaits des donateurs. J’avais dans l’idée d’ouvrir notre fonds à d’autres missions, mais les besoins sont tels au sein des écoles, que nous restons sur cette priorité. Et tout commence à l’école… et à l’église.
« NH » – En plus des sommes versées aux écoles pour la construction ou comme aide annuelle, vous financez aussi la publication de livres, l’achat de livres en vue de constituer des bibliothèques de livres arméniens pour la jeunesse. Quels sont les vrais besoins des écoles ?
R. A. – Effectivement, nous avons aussi été heureux d’accompagner des auteurs, toujours dans le domaine de l’enseignement et de la langue pour l’édition de leur ouvrage, ainsi l’arménien global publié récemment. Et comme vous dites, nous finançons depuis trois ans l’envoi de livres pour les écoles. Nous sommes attachés au livre. Et nous restons convaincus qu’offrir des livres, bâtir des bibliothèques reste nécessaire même dans un monde où le tout numérique prédomine. Alors certes, nous finançons des programmes audiovisuels que l’on trouve sur le Web mais il faut aussi veiller à un bon équilibre, et je crois que le livre, le papier, favorisent une autre forme de partage, entre les élèves et l’enseignant. Et de tout temps, les écoles auront besoin du livre pour progresser sur la voie de l’apprentissage de notre langue. Une bibliothèque n’est pas un lieu inerte, elle doit vivre en permanence, se renouveler. Des livres disparaissent, un temps parfois, d’autres naissent ou se renouvellent; c’est un cycle et il nous faut l’accompagner. En somme, la Fondation EBFA s’attache tout autant aux murs qu’aux livres, pour l’épanouissement des enfants et la transmission de notre langue.
« NH » – Pour financer, il faut recueillir des fonds ; quelles sont vos sources de financement ? Faites-vous appel à la communauté arménienne ?
R. A. – Nous faisons toujours appel à la communauté. Notre cible, ce sont les arméniens qui paient l’Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI) et qui peuvent, grâce à notre Fondation (sous l’égide la Fondation de France), défiscaliser 75% de leur don ! Et ce jusqu’à 50.000 euros ! Ce n’est pas rien comme « cadeau fiscal » … mais j’ai remarqué que beaucoup d’Arméniens n’osaient pas trop étaler leur réussite et payer l’IFI, c’est pour certains s’afficher riche. Alors je le redis, nous avons toujours assuré la confidentialité des dons quand on nous le demandait et jamais, jamais, nous n’avons été pris en défaut sur notre promesse. Enfin, avec nous, votre impôt prend du sens, l’Etat nous offre cette opportunité ? À ce jour, notre base de donateurs demeure trop étroite et les Fondateurs assurent encore chaque année au moins plus de la moitié des ressources de la Fondation.
Renseignements en toute discrétion : Raffi Agopyan
raffi.agopyan@gmail.com