Dans sa décision du jeudi 10 novembre, le tribunal administratif de Strasbourg donne raison à la préfecture du Bas-Rhin et à plusieurs élus Les Républicains. Ces derniers avaient attaqué la délibération fixant les conditions d’une subvention de près de 2,5 millions d’euros à la mosquée Eyyub Sultan.
Pour rappel, le soutien à ce chantier mené par la communauté musulmane Milli Görüs (une association turque) avait suscité un scandale national, alimenté par le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin.
Le tribunal administratif de Strasbourg par sa décision de ce jour annule donc le texte adopté par le conseil municipal le 22 mars 2021.
Le verdict du tribunal administratif repose sur de nombreuses irrégularités commises par la mairie de Strasbourg. Il rejette tout d’abord l’argument de la municipalité écologiste qui estime que la délibération du 22 mars est désormais sans objet, puisque l’association de la mosquée Eyyub Sultan a retiré sa demande. Ainsi, il est rappelé que « si l’association [Milli Görüs] fait valoir qu’elle a entendu renoncer au bénéfice de la subvention, il ressort des termes de son courrier en date du 15 avril 2021, sans que cela soit sérieusement contesté, que cette renonciation est seulement temporaire. »
Le tribunal administratif reprend aussi l’un des arguments des cinq conseillers municipaux Les Républicains ayant attaqué cette délibération. Ces élus reprochent une information insuffisante en amont du vote, lors du conseil municipal du 22 mars 2021. Pour le président de l’audience Xavier Fassel, l’absence de précisions sur les difficultés de financement des constructeurs est « de nature à priver les membres du conseil municipal d’une information adéquate pour exercer utilement leur mandat ».
Un autre argument de contestation pour le tribunal administratif : Si pour la mairie de Strasbourg, Jeanne Barseghian, la délibération du 22 mars 2021 applique la même philosophie que celle de Fabienne Keller lors de la construction de la Grande Mosquée de Strasbourg au début des années 2000, le président du tribunal rappelle que « la demande de subvention de la Grande Mosquée Eyyub Sultan a été déposée postérieurement au démarrage de la construction et que l’association n’a, à aucun moment, présenté un plan de financement. » Ainsi le tribunal estime que « la commune de Strasbourg a méconnu le cadre réglementaire qu’elle s’était fixé elle-même pour l’examen des demandes de subventions au bénéfice d’associations cultuelles. »
L’un des derniers arguments du tribunal administratif porte sur le besoin local d’un édifice religieux tel que la mosquée Eyyub Sultan. La préfète du Bas-Rhin affirme que les capacités existantes pour l’accueil des fidèles musulmans sont suffisantes sur le territoire strasbourgeois. Or, comme l’indique le président du tribunal, la commune de Strasbourg n’apporte aucune preuve de tels besoins locaux en édifice religieux. « Dans ces conditions, l’existence d’un intérêt public local n’est pas établi », conclut-il.
La décision du tribunal administratif peut faire l’objet d’un appel jusqu’au 10 janvier 2023.