TURQUIE – Quand le qualificatif « arménien » est utilisé comme une insulte

Tanju Özcan, maire de Bolu

Bien que le titre ne présente pas une réalité nouvelle en Turquie, en voici un nouvel épisode.

Tanju Özcan, maire de Bolu, a publié un message qui a fait parler sur les réseaux sociaux en fin de semaine. S’adressant au leader du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), Abdullah Öcalan (alias Apo), détenu dans la prison de l’île d’Imrali depuis son arrestation en 1999 au Kenya par les services secrets turcs, il a écrit : « Si seulement ton père arménien s’était retiré deux secondes plus tôt et que tu n’étais jamais né, traître ! »

Rappelons qu’en Turquie, les nationalistes extrémistes cherchent à « faire d’une pierre deux coups » affirment depuis des décennies qu’Abdullah Öcalan est arménien. « D’une pierre deux coups » car, selon eux, ils injurient ainsi les personnes qu’ils détestent le plus, de la pire insulte possible, «arménien».

Cette publication du maire de Bolu a naturellement suscité de nombreux soutiens mais aussi de vives réactions, tant dans les milieux arméniens que turcs. Le Patriarcat arménien de Constantinople a également publié un communiqué de condamnation. Parmi les réactions d’opposition turques, celle du chanteur Ezhel est notable : « Je boycotte ce misérable et le CHP qui n’a rien fait contre ce raciste. Démolissez donc le Dolmabahçe qui a aussi été construit par un Arménien. »

Oui, « Je boycotte aussi le CHP », dit le chanteur, car le maire de Bolu appartient au CHP (Parti républicain du peuple), censé être le parti le plus « démocratique, progressiste et libéral » de Turquie.

***

Il faut aussi rappeler que, sous l’administration de ce même maire, membre d’un parti se revendiquant des valeurs de « démocratie, progrès et ouverture », une statue du footballeur turc Merih Demiral avait été érigée l’année dernière sur l’une des places centrales de Bolu, avec une grande fierté et une « hâte remarquable ». Ce « sportif » avait été suspendu pour plusieurs matchs après avoir fait le signe des Loups gris lors du Championnat d’Europe des nations. Inévitablement, la statue conserve ce « fier » détail : le geste des Loups gris.