Le 4 mars, l’Arménie a célébré la Journée du Diplomate. À cette occasion, s’adressant au personnel du Ministère des Affaires étrangères, Nikol Pashinyan a déclaré : «On peut constater à l’œil nu que la période précédente a été une année très active sur le plan diplomatique. Nous établissons de nouvelles relations que nous n’avions pas auparavant, nous développons et précisons nos relations existantes, et tout cela doit être considéré dans le contexte d’une politique étrangère « équilibrée ». Ce contexte vise à maintenir la République d’Arménie dans un état équilibré. »
Bien que cette observation soit juste, l’Arménie, aujourd’hui, mais plus généralement, tous les États du monde, sont confrontés au même problème : retrouver un équilibre dans les relations internationales en raison du changement des règles du jeu imposé par le pays le plus puissant du monde. Naturellement, tous les États se trouvent contraints de se repositionner les uns par rapport aux autres et de réorganiser leurs relations. Et étonnamment, cette contrainte frappe particulièrement les alliés des États-Unis et en premier lieu l’Europe, l’Ukraine, le Japon, la Corée du Sud… Et elle frappe aussi l’Arménie qui a conclu un pacte de partenariat stratégique avec les États-Unis à la fin du mandat de Biden.
La France de même que toute l’Europe, qui constituent un pilier important dans l’équation d’équilibre de la sécurité de l’Arménie aux côtés des États-Unis, sont également en crise. Droits de douane imposés par les États-Unis, revendications territoriales, renoncement aux obligations défensives concernant les alliés de l’OTAN, ingérence dans les affaires intérieures des États alliés, refus de prêter une aide militaire à l’Ukraine, qualifier des dirigeants d’États alliés de dictateurs, tout en justifiant l’attaque de la Russie contre l’Ukraine. Le président Trump démantèle de sa propre main la plus importante alliance militaire créée par les États-Unis après la Seconde Guerre mondiale, celle entre les États occidentaux, alliance à laquelle les alliés participaient volontairement sans aucune contrainte d’une puissance suprême dominante.
Le président américain, en niant la primauté du droit international, en condamnant l’OTAN à l’inaction, patronne les régimes autoritaires. La seule exception à la politique mercantiliste du président Trump reste Israël, avec lequel il a renforcé les relations sécuritaires. Ce qui démontre son jeu politique discriminatoire, capricieux et instable.
Naturellement, avec le temps, tout cela finira très probablement par nuire à la prospérité et à la puissance des États-Unis. Et les réactions des États européens montrent cet isolement des États-Unis. La France réclamait depuis des années la création d’une armée européenne, et se heurtait à l’opposition de l’Allemagne et des pays d’Europe de l’Est, qui s’accrochaient au parapluie défensif américain. La décision des États-Unis de mener seuls les négociations avec la Russie pour établir un cessez-le-feu en Ukraine, a poussé les pays européens à accepter la réunion d’urgence, initiée par le président français, consacrée à l’autodéfense de l’Europe. Le Premier ministre britannique a fait de même après sa rencontre infructueuse avec le président américain.
La nouvelle règle du jeu dans les relations internationales ouvre naturellement un champ nouveau pour la diplomatie arménienne qui doit trouver un équilibre dans le cadre d’un voisinage hostile. Après la guerre de 2020, face à l’inaction du système de défense allié de la Russie, le partenariat stratégique avec les États-Unis était un facteur d’équilibre influent pour la sécurité de l’Arménie. Elle est, aujourd’hui, dans l’obligation de revoir ses calculs.
J. Tch. ■
© 2022 Tous droits réservés