Deux jours avant la commémoration du 37e anniversaire du pogrom anti-arménien de Sougaït, l’appareil d’état de la propagande azerbaïdjanaise s’est à nouveau déployé pour réactiver la rengaine du « Génocide de Khodjaly » attribué aux « forces arméniennes » et au 366e régiment de l’armée russe.
Le 26 février, date anniversaire de cet événement de la « Première guerre de l’Artsakh », le régime aliévien avait convoqué les responsables des religions présentes dans le pays afin de participer à la cérémonie qui s’est déroulée devant le monument appelé « Le cri de la mère » du quartier Khatai de Bakou. Parmi ces derniers, se trouvaient le Cheikh-Ul- Islam Allahchukur Pachazadé, Grand Mufti d’Azerbaïdjan et du Caucase, l’évêque orthodoxe russe Alexy, l’évêque catholique Vladimir Fekete, les rabbins des communautés juives du pays et l’incontournable Robert Mobili, l’idéologue et fondateur de la prétendue « communauté chrétienne albano-oudie ». Le même jour, une douzaine d’hommes membres de cette organisation se sont rassemblés en l’église [arménienne] saint Élysée de Nij pour participer à un « office » dédié au souvenir des « martyrs de Khodjaly» (dixit la presse azerbaïdjanaise).
On ne peut naturellement que regretter que les victimes du pogrom de Soumgaït ne bénéficient pas de la même compassion de la part des responsables religieux russes, catholiques, protestants, juifs et yézidis d’Arménie, comme d’ailleurs la modestie de l’hommage qui leur est rendu à Erevan dans une grande discrétion.
Le gouvernement et l’Église arménienne tiennent sans aucun doute là une occasion de collaborer activement pour organiser dès l’an prochain une cérémonie solennelle devant le khatchkar dédié aux victimes de cette tuerie au mémorial de Dzidzernagapert[1]. Et même si, à la différence de son voisin, l’Arménie est un état « laïc »[2] et démocratique, rien ne devrait empêcher les autorités gouvernementales d’y inviter les représentants des cultes du pays. On pourrait d’ailleurs à cette occasion imaginer qu’une journée nationale soit consacrée au souvenir des victimes des pogroms anti-arméniens de Soumgaït, de Bakou et de Kirovabad et de l’exode forcé des 450 000 Arméniens d’Azerbaïdjan dans les années 1990.
Sahak SUKIASYAN
[1] Un mémorial discret et bien modeste par rapport à celui de Khodjaly à Bakou.
[2] I. Aliev répète à l’envi que son pays est un état laïc, mais il sait dans le même temps parfaitement utiliser la religion, le sentiment religieux et les religieux.
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