ÉDITORIAL – Relations Russie-Arménie

Guerre hybride et croisement d’intérêts économiques

Les mois de novembre-décembre ont été des mois de travail diplomatique très intense pour l’Arménie, tant au niveau de l’UE que de l’UEEA et de la CEI. Le premier succès concerne l’établissement d’un nouvel agenda stratégique UE-Arménie, où sont soulignés la libéralisation des visas et le soutien aux Arméniens déplacés du Haut-Karabakh, ainsi que le renforcement de la sécurité, c’est-à-dire la gestion des crises en cas de menaces hybrides.

Deuxièmement, la signature d’une déclaration de partenariat stratégique avec l’Allemagne, qui stipule que « l’Arménie et l’Allemagne coopéreront plus étroitement à l’avenir dans les domaines de la diplomatie, de l’économie, de la science, de la culture, de divers programmes de développement, de la sécurité et de la défense ».

Troisièmement, la participation du Premier ministre Pachinian aux sommets des dirigeants des pays membres de l’UEEA et de la CEI, où ont été soulignées les conséquences positives de la construction de la « Voie TRUMP » pour l’établissement de la paix et le développement économique dans la région. À cet égard, pour la première fois au cours des 30 dernières années dans l’espace CEI, est mis en service le transport par voie ferroviaire de céréales de Russie et du Kazakhstan vers l’Arménie en transitant par l’Azerbaïdjan, ce qui représente le déblocage d’une importante route commerciale. De même pour l’achat direct de pétrole azéri. Dans le cadre de la réunion de l’UEEA, lors des discussions bilatérales Poutine-Pachinian, le président russe a rappelé l’évolution positive du commerce Russie-Arménie. Quant au vice-Premier ministre russe Overchuk, il a confirmé qu’il prévoit d’exporter vers l’Arménie, via le territoire azerbaïdjanais, non seulement des céréales mais aussi des engrais.

Le Premier ministre Pachinian a déclaré qu’il est aussi envisagé d’exporter, en sens inverse, des marchandises de l’Arménie vers l’Azerbaïdjan et la Russie.

Cette stratégie de développement de relations diplomatiques équilibrées avec ces deux zones économiques opposées n’exclut pas qu’une lutte hybride acharnée soit menée par la Russie contre le gouvernement arménien à l’approche des élections de 2026 pour renverser le pouvoir en place, afin d’arrêter la pénétration européenne en Arménie et, par son intermédiaire, dans la région du Caucase du Sud.

La guerre hybride en Arménie ne se limite pas aux activités contre le pouvoir dans le domaine informationnel, aux leviers économiques, aux subventions et aux réseaux sociaux. L’implication de hauts ecclésiastiques de l’EAA dans une lutte radicale en est l’un des exemples les plus frappants, visant à renverser le gouvernement de Pachinian et à perturber son projet «Carrefour de la paix», comme le mouvement
« Lutte sacrée » de l’archevêque Bagrat Galstanian, qui, au nom de la défense des valeurs nationales, exigeait le renversement du pouvoir.

Le gouvernement travaille de manière extrêmement cohérente à neutraliser les activités des ecclésiastiques pro-russes. La révélation de la semaine dernière par le NSS selon laquelle le frère du Catholicos Karékine II, l’archevêque Yezras, primat des Arméniens de Russie et du Nakhitchevan, fut un agent du KGB entre 1986 et 1988, suggère la lutte informationnelle du pouvoir pour défendre l’État. Déjà le 4 novembre dernier, la remise par Poutine à ce même archevêque Ezras de l’ordre d’Alexandre Nevski pour les services rendus à la Russie est une image éloquente des sombres  manifestations de la guerre hybride. Le pouvoir accuse également Sa Sainteté d’être au service d’un État étranger.

La diaspora fait-elle également partie de la guerre hybride ? Le site web de « Nor Haratch » est attaqué depuis cinq jours. La recherche sur Google du site norharatch.com renvoie à un site de jeu turc qui, selon l’expert IT de NH, est l’œuvre de pirates russes qui, en redirigeant vers un site turc, ont voulu cacher la véritable identité des hackers.

J. Tch.

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